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An Online Encyclopedia of Roman Rulers

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Nero (54-68 A.D.)

Donatien Grau
Ecole normale supérieure-Ulm

Coin with the image of the Emperor Nero

Introduction

Ecrire sur Néron, c'est emprunter une voie pleine de périls, la voie des plus graves péchés de l'historien, celle de la partialité excessive. Pierre Grimal l'a bien vu, il existe un « procès Néron » [[1]]. En cette querelle, il existe un accusé, le prince lui-même, il existe des accusateurs, les sources littéraires le plus souvent, et il existe des juges : la postérité, et ceux qui l'écrivent, partant de présupposés parfois contestables [[2]]. Sont à disposition les pièces du « dossier Néron » : inscriptions, en particulier celle d'Akraiphia [[3]], sculptures, fouilles, monnaies, et, bien entendu, textes littéraires : pour ne citer que les plus importants, Sénèque, Lucain, Calpurnius Siculus, Pline l'Ancien, Tacite, Suétone, Plutarque, Dion Cassius le Pseudo-Aurelius Victor, Aurelius Victor, Eutrope, Eusèbe de Césarée, et le Pseudo-Lucien de Samosate. Le principal problème posé par l'étude des temps néroniens et, plus encore, par l'étude biographique du prince en lui-même, c'est l'incomparable partialité de ces écrits. Tacite impute à Néron des meurtres impossibles [[4]], Suétone renchérit et les auteurs tardifs reprennent la « légende noire » en renforçant le trait jusqu'à la caricature. Au IVe siècle, païens aussi bien que chrétiens évoquent avec horreur la figure maudite de l'empereur fou. Julien, dans le Banquet des Césars [[5]], voit « le Cocyte l'engloutir ». Eusèbe, évêque de Césarée, cloue au pilori [[6]] les « actes impies », « la scélératesse dont cet homme fut capable ».

L'écriture néronienne s'est embuée de lieux communs sur l'incendie de Rome, sur la persécution des chrétiens et sur les orgies. On a même pu voir en le dernier des Julio-Claudiens un « anti-Auguste » [[7]] : sont opposés à la sobriété, à la mesure, et au respect à tout le moins apparent manifestés par le fondateur du principat la démesure, l'irrespect envers la tradition et le goût pour l'innovation de son descendant. Il est nécessaire de noter combien de telles remarques se fondent, sans doute avec trop de confiance, sur les sources antiques, soucieuses le plus souvent d'établir des portraits affrontés entre Auguste et Néron, vouant l'un au ciel, l'autre aux gémonies. Si l'on peut tenter de définir une typologie de l'évolution historique de la perception de Néron, il est possible de la voir en trois temps. Le premier moment consiste en les textes contemporains à Néron ou de peu postérieurs, c'est-à-dire Calpurnius Siculus [[8]], Sénèque [[9]] et le Pseudo-Sénèque [[10]] : pour éreinter la figure du prince, il est comparé à Auguste, à son détriment comme de juste. Dans une deuxième période littéraire, à partir de la fin du Ie siècle , avec Tacite [[11]], Suétone [[12]] et Lucien de Samosate [[13]], en particulier, la figure de Néron prend son autonomie, avec ses vices. Le IVe siècle, quant à lui, réalise une identification qui n'est en rien évidente pour un contemporain de Néron, l'identification à Caligula[[14]]. Nous sommes restés marqués par l'approche du IVe siècle, la plus proche de nous historiquement, sans pour autant prendre en compte le préambule de trois siècles qui l'avait précédée.

A force de vouloir chercher ce qu'était Néron, l'homme, nous avons rendu plus épais encore qu'il ne l'était déjà le brouillard qui nous sépare de lui. La regrettée Judith Ginsburg, dans un ouvrage qu'elle a consacré à Agrippine[[15]], son dernier, prenait pour point de départ l'impossibilité de découvrir qui était véritablement la fille de Germanicus, la sœur de Caligula, la femme de Claude, la mère de Néron, la marâtre de Britannicus. Considérant comme acquise l'impossibilité d'une étude caractérologique, elle préféra s'intéresser au rôle joué par la figure d'Agrippine dans l'histoire et dans la littérature, sans pour autant perdre de vue sa radicale singularité. La démarche qu'elle a adopté nous semble de loin la plus pertinente dans l'analyse de figures si contestées et qui ont suscité des commentaires tous contestables d'un certain point de vue, malgré leur ingéniosité souvent remarquable et leur véracité probable, parfois. Nous partirons donc d'une aporie, de l'impossibilité de rendre compte de Néron comme homme, afin de mieux étudier les circonstances qui ont vu son exercice du pouvoir, son rôle dans son époque, les causes et l'impact de sa politique.

Naissance et origines d'un prince impérial

Lucius Domitius Ahenobarbus, le futur Néron, est né en 37 ap. J.-C., à Antium, dans le Latium, lieu de résidence secondaire de l'aristocratie romaine. Il est le fils d'Agrippine la Jeune et de Gnaeus Domitius Ahenobarbus. Par sa mère, il est l'arrière arrière-petit-fils d'Auguste et le petit-fils de Germanicus, le brillant général. Par son père, il est l'arrière-petit-fils d'Antoine [[16]]. Outre son ascendance impériale, ses origines paternelles sont loin d'être humbles : les Ahenobarbi composent la branche la plus illustre de la gens Domitia, une des plus considérables de la nobilitas, de la « notabilité » tardo-républicaines [[17]]. L'un de ses ancêtres a fondé Narbonne, capitale de la Prouincia, au IIe siècle av. J.-C.. Dans des pages célèbres [[18]] ouvrant sa Vie de Néron, Suétone narre avec force détails les faits et gestes des ancêtres paternels du dernier des Julio-Claudiens. Il insiste sur les exactions qu'ils ont commises : l'un fut cruel, l'autre montra un goût immodéré pour le théâtre, un troisième viola la loi. La question se pose de la validité de ces affirmations. Régis Martin [[19]] voit dans ces portraits une source exceptionnelle pour comprendre le caractère de Néron en utilisant l'argument de l'hérédité. La tendance actuelle de l'historiographie contemporaine est de souligner la véracité des informations suétoniennes, de voir en lui un « historien » [[20]], qui utilise des éléments fiables. En ce cas, peut-être faudrait-il accorder crédit à cette thèse de l'hérédité. Ce n'est pas notre opinion. Aucun autre écrivain n'étaie ni ne corrobore les indications livrées par Suétone, qui peuvent tout autant être fausses. Judith Ginsburg [[21]] a bien montré combien le biographe est tributaire de sa formation rhétorique, combien il emploie sans cesse des lieux communs, des topoi de l'art oratoire. Dans la question de l'hérédité, on peut noter tout d'abord que l'insulte par les ancêtres est une des grandes pratiques du discours éristique dans l'Antiquité (comme dans les débats entre Démosthène et Eschine). De surcroît, si on analyse les trois personnages désignés comme prédécesseurs et signes avant-coureurs de Néron, on peut remarque qu'ils correspondent à une argumentation en trois parties, de type aristotélicien. La cruauté équivaut au pathos, le goût immodéré pour le théâtre à l'éthos et la violation de la loi au logos, la stratégie rhétorique de Suétone étant simultanément de mettre en place le mélange des catégories propre au monstrueux.

L'éducation de Néron, source de tous les maux

Face au phénomène néronien, les auteurs antiques et contemporains ont tenté d'expliquer l'hapax qu'il constitue par l'éducation défectueuse ou à tout le moins singulière qu'aurait reçu le prince. L'influence maléfique qu'aurait subi dès sa prime enfance Lucius Domitius Ahenobarbus expliquerait ses désordres futurs. Selon Suétone, des gens de peu, au service de Domitia Lepida à laquelle sa mère abandonna l'éducation de son fils, aurait d'abord eu à s'occuper de lui, « un danseur et un barbier » [[22]]. Puis cela aurait été le tour de deux affranchis, Anicetus et Betyllus, le premier étant destiné à assassiner Agrippine[[23]]. La deuxième proposition peut apparaître valable, puisque elle est évoquée à la fois par Suétone et Tacite, mais la première, soutenue par le biographe seul, semble douteuse. On y reconnaît une conception cyclique de la vie, répandue dans le monde antique (notamment sous la forme du mythe de l'Age d'or), selon laquelle un personnage ayant commencé dans la plus grande bassesse doit nécessairement finir dans la plus grande bassesse. Les textes antiques [[24]] louent unanimement les « qualités naturelles » (l'ingenium) de l'enfant, qu'il exprime dès son plus tendre âge. Dans cet éloge, il est possible de reconnaître d'une part une vérité historique, d'autre part un jeu rhétorique d'antithèse opposant à l'excellence initiale la déliquescence finale. Quoi qu'il en soit, en 49, après l'assassinat de Messaline, Agrippine la Jeune devient l'épouse de son oncle Claude, qui dirige alors les affaires de la Ville. Elle obtient le rappel de Sénèque, sa réintégration au sein du Sénat, et, pour lui, l'exercice de la préture [[25]]. Et, surtout, elle en fait le précepteur de son fils Lucius Domitius Ahenobarbus, alors âgé de douze ans. On a parfois voulu voir dans le rôle joué par Sénèque la cause ou à tout le moins l'origine des penchants de Néron pour l'art poétique [[26]]. Mais le philosophe jouait surtout le rôle de maître de rhétorique, dans lequel il excellait -ses œuvres en témoignent, et il ne faut pas oublier que son père n'était autre que Sénèque le Rhéteur.

Le prince impérial devient héritier de la pourpre

En 49, le prince fiance le fils de son épouse à sa propre fille, Octavie, après avoir ordonné, selon les auteurs antiques, à son promis, Silanus, descendant d'Auguste, de se suicider [[27]]. Et en 50, Lucius Domitius Ahenobarbus est adopté par Claude, il porte désormais le nom fréquent chez les Claudii de Tiberius Claudius Nero. Il est nécessaire de comprendre ce geste, de tenter de l'interpréter. Pourquoi Claude a-t-il privilégié le fils de son épouse par rapport à ses propres enfants ? Trois explications sont possibles, et sans doute se recouvrent-elles à tout le moins partiellement. La glose la plus courante est de voir là le résultat des intrigues menées par l'impératrice auprès de son époux. La tradition littéraire la voit omnipotente, les auteurs décrivent avec complaisance ses abus de pouvoir [[28]]. Elle aurait pour principal partisan l'affranchi Pallas. On peut aussi considérer, avec Guglielmo Ferrero [[29]], que Britannicus, puisque c'est lui le principal délaissé, ne pouvait être aux affaires, après la dépravation du comportement maternel. Claude, soucieux des bonnes mœurs et de la réputation, aurait désavoué un fils marqué du sceau du déshonneur et préféré un jeune homme prometteur. Enfin, Claude pourrait avoir choisi Néron pour s'attacher la gloire de son sang. Lui-même est issu des Claudii, la famille de Tibère, et en aucun cas celle d'Auguste. Or il existe à cette époque une véritable mystique de l'origine augustéenne. Christophe Badel [[30]] a bien montré combien cet ascendant a pu jouer dans le choix du prince. Cette présence de l'élément augustéen du régime est confirmée par les titres accordés ensuite par Claude à Néron [[31]] : il est consul désigné et prince de la Jeunesse. Des monnaies [[32]] frappées en l'honneur de l'héritier témoignent de ces titres. Or les deux fonctions sont celles de Gaius et Lucius Césars, les fils adoptifs d'Auguste[[33]]. Il semble donc probable que Claude s'inscrit dans la poursuite du modèle augustéen. Il n'en demeure pas moins que Néron apparaît comme un jeune homme accompli : il participe aux Jeux troyens [[34]], cérémonie imitant des joutes archaïques entre les jeunes gens de noble extraction. Il plaide en latin pour les habitants de Bologne et en grec pour ceux de Rhodes [[35]]. Il revêt la toge virile en 51, trois ans avant l'âge légal [[36]]. En 54, Claude meurt, Néron accède à l'empire. Les circonstances qui ont présidé au décès du prince sont obscures : selon les auteurs antiques [[37]], il a été empoisonné par son épouse. Néanmoins, au vu de l'âge avancé pour l'époque de Claude, il est fort possible que son décès soit dû à des causes naturelles [[38]]. Toutefois, c'est bien Agrippine qui a organisé la prise du pouvoir par son fils, notamment en obtenant le soutien du préfet du Prétoire Burrus. Le jeune homme de dix-sept ans peut bien proclamer qu'elle est la « meilleure des mères » [[39]].

Sur la notion de quinquennium Neronis

Selon Aurelius Victor [[40]] et le Pseudo-Aurelius Victor [[41]], on peut décomposer le principat de Néron, qui s'étend de 54 à 68, en deux moments : le premier est le « quinquennium », le lustre durant lequel Néron régna avec sagesse, et le deuxième est constitué de tout le reste de son gouvernement, donc de la période 59-68. Mais ce jugement a été mis en question : selon Miriam Griffin, il faut descendre la datation à 62, avec la répudiation d'Octavie [[42]]. Pour suivre T. E. J. Wiedemann, c'est 64, l'année de l'incendie de Rome, qu'il faudrait retenir [[43]]. Et la conjuration de Pison prend son ampleur en 65. On voit donc combien est contestable l'idée d'une telle fragmentation du principat néronien qui a beaucoup trop pour fondement les textes des auteurs antiques, eux-mêmes extrêmement partiaux. La datation ancienne a le mérite de l'habitude : elle est coutumièrement celle que l'on retient dans l'étude du fait et du principat néroniens et a pour elle la tradition. Néanmoins, les divergences quant au choix du tournant des quatorze années prouve, semble-t-il, qu'il n'existe pas de véritable frontière[[44]] qui permettrait de délimiter d'un côté, une période de raison, et de l'autre, la déraison, la folie, la démence. Cette approche manichéenne est, parfois, fondée sur des présupposés axiologiques dont l'intérêt est limité dans l'étude historique du phénomène Néron.

L'influence des conseillers sur nouveau prince

En 54, Rome a donc un nouveau maître. Il faut noter qu'il est le prince le plus jeune qu'ait jamais connu Rome, plus jeune même que Gaius. Il est donc soumis à un certain nombre d'influences, qui nous offrirons autant de clefs dans l'étude de cette première période du principat. Il est secondé par deux principaux conseillers dont le rôle est traditionnellement reconnu : Burrus, le Préfet du Prétoire sans collègue et Sénèque, sénateur, membre du Conseil du Prince. Cette institution, le Consilium Principis, chargée comme son nom l'indique d'aider le prince dans ses décisions, joue sous Néron un rôle accru dû à la jeunesse du chef de l'Etat romain [[45]]. Sextus Afranius Burrus est un militaire, il a, nous expliquent les sources [[46]], une saine influence sur le jeune prince, fondée notamment sur son bon sens italien. Le rôle de Sénèque est bien plus complexe et considérable. Peu après la mort de Claude, il rédige l'Apocoloquintose, ou Transformation en citrouille de Claude le divinisé, véritable pamphlet dans lequel il critique avec virulence la faiblesse intellectuelle de l'ancien prince, opposée au caractère presque divin du nouveau, proche en cela d'Apollon et d'Auguste [[47]]. Cette double association a pu sembler aux commentateurs contemporains bien étonnante : elle porte déjà en elle l'image apollinienne qui devait jouer un rôle si obsédant dans le principat néronien, mais elle est aussi marquée par le modèle augustéen.

Or Eugen Cizek, après Arnaldo Momigliano, a défendu dans nombre de ses ouvrages, et plus particulièrement dans sa biographie Néron, la thèse d'une influence « antonienne » [[48]] dans l'atmosphère et la politique de la cité impériale, influence visible dès les premiers jours du principat de Néron. Il interprète la figure solaire présente dans l'Apocoloquintose[[49]] comme une reprise par Sénèque d'un thème égyptien [[50]], notamment sous la forme du dieu Rê, thème égyptien qui serait selon lui consubstantiel à la vision hellénistique antonienne du pouvoir, pleine de passion et par là même opposée terme à terme à l'augustéisme d'autrefois. Nous ne pensons pas que tel est le message qu'a voulu transmettre le précepteur de Néron, tout d'abord, pour une question de principe : à quoi cela sert-il, pratiquement, d'annoncer aux Romains dès les premiers jours du règne le retour de leur pire épouvantail, victime de la tradition véhiculée par Auguste[[51]]? Politiquement, à rien. Et un pamphlet se doit, à l'évidence, d'être utile politiquement. Le propos d'Eugen Cizek se fonde sur deux présupposés qui peuvent être remis en perspective. Le premier consiste à voir dans la période augustéenne une période de calme apollinien contraire à une pulsion dionysiaque. Quand Friedrich Nietzsche a écrit La naissance de la tragédie, pensait-il à l'époque augustéenne ? Sans doute pas. Or le « siècle d'Auguste » est caractérisé par un mélange intime du dionysiaque et de l'apollinien [[52]]. En ce sens, dans son expression quasi hyperbolique de l'apollinien, en quelque façon d'un apollinien dionysiaque, Sénèque s'ancre au plus profond du noyau augustéen du régime. L'égyptomanie sénéquéenne est pour Eugen Cizek une marque de fabrique du penchant antonien du pouvoir néronien. Or des études récentes [[53]] ont montré que le premier prince lui aussi avait eu des inclinations pour le pays de la naissance du monde, comme on le considérait alors. Il semble donc que, comme il le dit d'ailleurs explicitement, Sénèque présente dans son texte des éléments augustéens comme arguments en faveur de son protégé. Quant au séjour de Sénèque en Egypte, qui nourrit en partie les thèses d'Eugen Cizek, on peut noter, avec Pierre Grimal [[55]] que, si ce voyage l'a certainement influencé, le philosophe ne l'évoque jamais directement dans ses œuvres et n'en fait un usage que fort rare. Peut-être faudrait-il plutôt voir en Sénèque, dans une optique certes « classique », mais néanmoins pertinente, un héritier et un héraut de la tradition politique romaine augustéenne, même et jusque dans ses inflexions monarchiques et hellénistiques.

On ne peut pas oublier le rôle joué dans la constitution d'une image augustéenne de Néron par le traité sénéquéen De Clementia, qui prend véritablement la place d'un discours de la couronne. Dans ce texte éminent, que François-Régis Chaumartin [[55]] date d'un an après l'accession au pouvoir du jeune prince, de 55, Sénèque indique clairement à son élève la voie à suivre : celle d'Auguste le divinisé, son illustre ancêtre, qui a su unir les deux pôles de la clémence, à la fois contrôle de soi-même et contrôle de l'autre [[56]]. C'est dans cette optique que Sénèque évoque le modèle que constitue le comportement du fondateur du principat dans l'affaire Cinna [[57]], anecdote dont Corneille a tiré sa pièce. La double présence d'Auguste et du Soleil levant nous invite à remettre nettement en perspective la réflexion sur l'apollinisme néronien, qui présente bien des traits augustéens. De surcroît, la figure du Soleil est ici assez proche, dans sa relation même à l'augustéisme, des formes qu'il prend dans la suite du principat, ce qui montre que le culte solaire n'est pas et ne saurait être une dérive orientalisante. C'est que les idées dont Sénèque se fait le champion dans la totalité de son œuvre ont souvent une consonance augustéenne [[58]] ; en ce sens, il exerce pleinement son rôle de « penseur de l'époque julio-claudienne ». Si l'on ne saurait sans risque mettre en question le témoignage unanime des sources littéraires, on peut toutefois faire une remarque utile à propos de Burrus et Sénèque : leur dualité apparaît comme un thème rhétorique, d'ailleurs cher au philosophe dans son écriture, celui du double. Ce n'est pas là une évidence. On peut rapprocher ce « binôme » d'Agrippa et de Mécène. Le premier apparaissait comme un bon militaire, pas nécessairement un intellectuel, mais ayant le sens des réalités, partisan de la République. Le deuxième était décrit comme le « ministre de la Culture » d'Auguste, raffiné, exotique car étrusque d'origine royale, favorable à la monarchie. On peut presque décalquer trait pour trait ces deux portraits et les adapter à Burrus et Sénèque. Il est possible de tirer de ce rapprochement une triple conclusion. Ou les princes s'entouraient souvent de deux conseillers (c'est aussi le cas pour Claude, avec Narcisse et Pallas, même si Polybe jouait aussi un rôle). Ou Néron a voulu imiter Auguste. Ou les écrivains plus tardifs ont attribué à ce duo un rôle qu'il n'avait pas nécessairement, Dion Cassius ayant des lignes cruelles pour souligner combien Sénèque voulait « s'approprier » l'admiration de son élève et exercer un empire absolu sur lui [[59]], lignes qui pourraient abonder dans ce sens d'un monolithisme du pouvoir.

Une politique avisée (54-59)

On attribue souvent à l'influence du philosophe un certain nombre de décisions et de pratiques considérées comme judicieuses, en particulier par les auteurs oligarchiques, Eugen Cizek, notamment, y a vu une modération partielle des tendances antoniennes du régime, un « libéralisme trompeur » [[60]]. Néron supprime le poste d'a rationibus, sorte de ministre des Finances, et nomme à la préfecture de l'annone Faenius Rufus, favorable au Sénat [[61]]. Faits symboliques [[62]], il refuse le titre de Père de la Patrie jusqu'en 56, et ne revêt la puissance tribunitienne qu'en 57. Il respecte -à tout le moins formellement- le Sénat [[63]]. Une partie du monnayage en métaux précieux [[64]], or et argent, porte, fait inaccoutumé depuis Auguste, la marque SC qui, si son interprétation pose problème [[66]], est néanmoins souvent complétée en « Senatus Consulto », « par sénatus-consulte ». Néron prend d'autres mesures qui contribuent à renforcer son image de marque. Il fait notamment montre de pietas, cette vertu chère au cœur des Romains et qui consiste à honorer ses parents. Son père adoptif est divinisé et des deniers et aurei [[66]] le représentent aux côtés d'Auguste. C'est Agrippine qui devient la prêtresse en charge de son culte. De surcroît, il dirige l'achèvement des travaux d'Ostie, lancés par Claude, peut-être sur un projet d'Auguste lui-même [[67]]. On retrouve cette double pietas, qui associe étroitement Claude à Auguste. Il ne faut pas oublier que Claude est le deuxième prince à être élevé au rang des dieux après sa mort, le deuxième avec Auguste[[68]].
 

Evoquer la pietas de Néron sans rendre compte du rôle joué par Agrippine dans les premières années de son principat, c'est mener un propos nécessairement incomplet. Depuis des siècles, le discours sur Agrippine n'a guère évolué : d'une manière grossière, les études historiques en sont restées, jusqu'à il y a peu, à la posture de Dion Cassius, c'est-à-dire au point mort. L'auteur grec du IIIe siècle s'irritait de voir Agrippine recevoir les ambassades et envoyer des lettres aux souverains étrangers [[69]]. Eugen Cizek fait de la lutte « contre Agrippine » le titre d'un des chapitres de son ouvrage [[70]]. L'ambition d'Agrippine, sa volonté de « mener » son fils est un leitmotiv des témoignages littéraires la concernant [[71]]. Parmi les pièces souvent ajoutées au « dossier Agrippine », figure un type numismatique [[72]], d'aurei et de deniers frappés en 54-55, type à l'avers duquel sont représentés les portraits accolés à droite du jeune Néron et d'Agrippine. Une analyse « classique » consiste à voir dans ce double portrait la manifestation du pouvoir et de l'influence de la mère du prince, qui l'avait « fait roi » [[73]]. De la sorte, les variations, qui font que le portrait d'Agrippine est au premier ou au deuxième plan, seraient des symboles de la disgrâce dans laquelle elle serait tombée en 55. Cette interprétation, pour vraisemblable qu'elle soit, n'en présente pas moins une grave faille, qui se résume en une question de pure logique : à quoi cela servirait-il de représenter la mère de l'Auguste avec une légende longue pour finalement signifier sa disgrâce, surtout en 55, au moment de la mort de Britannicus ? Il est plus envisageable de considérer la monnaie comme un gage de la cohésion de la famille impériale au moment de ce décès. Les auteurs antiques ont transmis les pires rumeurs sur les relations entre la mère et le fils, allant jusqu'à les accuser d'inceste [[74]]. Cette accusation a amené certains chercheurs à voir dans cette transgression des règles humaines un engagement du pouvoir en faveur d'une transformation du principat augustéen en monarchie hellénistique [[75]]. C'est, vraisemblablement, beaucoup trop s'avancer que de défendre cette thèse. En effet, les auteurs antiques sont animés d'une grande haine envers cette figure de la femme de pouvoir. Judith Ginsburg, dans son remarquable essai Representing Agrippina, a bien souligné deux dominantes des portraits donnés de la fille de Germanicus. Tout d'abord, et c'est l'élément central de son ouvrage, elle ne nous est parvenue que sous la forme de topoi, de stéréotypes rhétoriques. On a l'impression, en lisant les auteurs antiques, qu'ils ont voulu en faire un exemplum, c'est-à-dire un « modèle », ou plutôt, en l'occurrence, un contre-modèle. Ainsi est-elle la « Saeua Nouerca », la « cruelle marâtre » [[76]], le « Dux Femina », que l'on pourrait traduire par « maîtresse-femme » mais qui littéralement signifie « la femme [qui joue le rôle du] général » [[77]] et une incarnation de la transgression sexuelle [[78]]. L'autre élément sur lequel l'approche de Judith Ginsburg est particulièrement novatrice, et de manière fort intéressante, c'est la question de la relation entre Agrippine et Livie. Judith Ginsburg a en effet montré le parallèle existant entre les deux parcours politiques de ces femmes puissantes, qui ont, l'une comme l'autre, joui de leur vivant du titre d'Augusta, qui ont, l'une comme l'autre, été représentées de leur vivant sur des monnaies [[79]]. L'une comme l'autre ont joué un rôle considérable sous le principat de leurs fils. L'une comme l'autre ont joué le rôle de courroie de transmission du pouvoir entre leur époux et leur fils. Alors, peut-on se demander, pourquoi Suétone, Tacite et Dion Cassius, pour ne citer qu'eux, vilipendent-ils Agrippine et encensent-ils Livie ? Pour une raison bien simple. Livie est une figure politiquement neutre, sinon favorablement envisagée, ce qui n'est pas le cas d'Agrippine, mère du dernier des Julio-Claudiens contre lequel une campagne de désinformation a été menée dès l'année 68. Sans aller jusqu'à nier l'importance du pouvoir qu'elle a exercé dans le principat de son fils, il est nécessaire de le remettre en perspective, notamment en le comparant au modèle de Livie.

Mais la politique de Néron n'inclut pas seulement la pietas et sa mise en scène. Le fils de Domitius, le descendant d'Auguste est aussi un mécène, un protecteur des arts, et ce dès les premiers jours passés aux affaires. Son goût pour les Lettres en particulier a été noté par les auteurs antiques, qui l'ont pour cette raison assailli des critiques les plus acerbes [[80]]. Sa politique favorable aux écrivains a donné au latin quelques uns de ses plus purs chefs-d'œuvre. Les premiers à venir à l'esprit proviennent du corpus sénéquéen. Le philosophe est aussi l'auteur de pièces de théâtre remarquables : Hercule furieux, Les Troyennes, Les Phéniciennes, Médée, Phèdre, Œdipe, Agamemnon, Thyeste sont imités de l'antique, en particulier d'Euripide, mais le polygraphe leur ajoute une double originalité. Il renforce le caractère philosophique de certaines tirades, et, surtout, il donne sa pleine force à une esthétique du monstrueux, que l'on a pu qualifier de « baroque », et qui se manifeste par une extrême expressivité scénique [[81]]. C'est aussi sous le principat de Néron, notamment durant ces premières années, que Sénèque écrit un certain nombre de ses traités [[82]]. Outre le De Clementia, on peut citer le nom du De constantia sapientis (La persévérance du philosophe), du De uita beata (Comment arriver au bonheur) et du De beneficiis (Comment répondre à un bienfait). On remarquera que les titres de ces deux derniers textes sont à relier à une époque heureuse, qui seule permet des réflexions sur, littéralement, la « vie heureuse », et les « bienfaits ». Mais Sénèque, malgré le caractère monumental de son œuvre, n'est pas le seul génie dont les textes d'époque néronienne nous soient parvenus. Il y a Perse, et ses Satires. D'inspiration stoïcienne, elles évoquent la figure du prince et la vie quotidienne à Rome. Leur complexité et leur recherche stylistiques et syntaxiques participent aussi de cette esthétique dite du « baroque ». Il y a Calpurnius Siculus et ses Bucoliques, datées du début du principat. Les sept morceaux de bravoure qui composent le recueil réécrivent le modèle virgilien, reprenant les mêmes personnages, venus de la poésie syracusaine. De surcroît, l'auteur emploie aussi des thèmes virgiliens, en particulier celui de la renaissance de l'Age d'or. Il y a les poésies grecques, dont l'Anthologie palatine nous donne deux exemples, avec les deux textes écrits en l'honneur de Néron par Antiphile de Byzance [[83]] : il semble possible de les dater plus tardivement, vers la fin du principat, notamment à cause de l'allusion solaire, mais nous avons vu que ce thème est présent dès 54 et même dès Auguste. Il y a, enfin et surtout, Lucain, et la" Pharsale, cette grande épopée qui a probablement été commencée durant ces années, alors que le poète avait moins de vingt ans [[84]]. Lui aussi, neveu de Sénèque, développe cette esthétique de la radicale et inquiétante étrangeté, fondé sur le surnaturel et l'horreur [[85]]. Jean-Michel Croisille a bien montré dans sa thèse, Poésie et art figuré de Néron aux Flaviens, Recherches sur l'iconographie et la correspondance des arts à l'époque impériale, combien la période néronienne correspondait à une sorte de seconde naissance de la poésie latine [[86]]. Il a souligné, comme le titre de son travail l'indique, la « correspondance » qui pouvait exister entre un art fondé sur des références littéraires et une littérature où l'image joue un grand rôle, notamment sous la forme de la figure de style qu'est l'ekphrasis. Ces processus littéraires conduisent à un art consommé, très raffiné et complexe [[87]]. Et dans cet art, le prince joue, directement ou indirectement, un grand rôle. Lucain en témoigne parfaitement quand, dans la Pharsale [[88]], il évoque la figure solaire du prince, à peu près de la même manière que Properce, dans ses Elégies, loue Apollon-Auguste. Et nous arrivons au point essentiel de ces quelques remarques sur la littérature des temps néroniens : il nous semble que sa relation au prince est peu ou prou similaire à celle qui liait Auguste à ses poètes. Nous reconnaissons bien entendu la différence stylistique existant entre les auteurs d'époques différentes, quoique l'on puisse aisément trouver chez Virgile des passages faisant preuve d'un certain baroque [[89]]. Mais ce mélange du religieux et du poétique [[90]], cet hommage et cette référence perpétuels au chef de l'Etat, sont de toute évidence des marques d'une aspiration augustéenne de la poésie néronienne.

La politique menée par Néron présente aussi des traits augustéens : jusqu'en 59 et même un peu ultérieurement, les conservateurs dirigés par Paetus Thrasea jouent un rôle considérable au Sénat et participent activement à la direction politique de Rome [[91]]. Les décisions économiques du prince sont empreintes de modération [[92]] : il limite les dépenses publiques, réforme les taxes en essayant de les alléger, ne manifeste pas une outrageuse magnificence. Le principal problème d'une réflexion sur la politique économique de Néron réside en ce que nos seules sources sont littéraires et que leur penchant général est de rendre éclatantes les premières années afin de noircir d'autant plus la suite du principat. La politique étrangère de Rome suit elle aussi trois tendances augustéennes. La première et la plus importante est la préservation de la Paix romaine [[93]] : il n'y a pas, sous Néron, du début à la fin du principat, de conflit majeur engageant la sécurité de Rome. La deuxième est l'organisation des provinces impériales : les Alpes Cottiennes et le Pont deviennent des provinces, et ce dès les premières années du règne [[95]]. La troisième est l'intransigeance absolue face à l'ennemi héréditaire, le Parthe. L'une des premières décisions du nouveau prince est de nommer Gnaeus Domitius Corbulo, Corbulon, à la tête des opérations d'Orient, notamment pour maintenir l'influence romaine en Arménie. Le général y réussit parfaitement, il entre à Tigranocerte, la capitale du royaume, en 59, et impose le candidat de l'empire sur le trône, sous obédience romaine, comme le prouvent des inscriptions en latin qu'il a laissées en Arménie [[95]]. Néron, sur les monnaies de cette période, et jusqu'en 64, représente abondamment les allégories chères aux conservateurs romains, la Virtus, l'allégorie de Rome, les divinités Cérès et Mars [[96]].

Les conflits des débuts du principat (54-59)

Il est nécessaire de rendre compte des points d'achoppement de cette première période du principat néronien. Ils sont au nombre de trois, principalement. Le premier consiste en la débauche de l'Auguste. Il a failli épouser son affranchie Acté, nous rapportent avec indignation les auteurs antiques [[97]]. Il délaisse sa femme légitime, la fille de Claude, Octavie[[98]]. Il erre dans la ville, toujours en quête de nouvelle dépravation. Il prend à son ami Marcus Salvius Otho son épouse, Poppea Sabina [[99]], et en fait son amante. On retrouve dans cette brève description un certain nombre de lieux rhétoriques qui sont appliqués à la figure de Néron. Encore une fois, sans nier la véracité historique de certains éléments, il faut préciser combien la figure que la postérité a gardé du dernier des Julio-Claudiens est dépendante de « constructions du pouvoir », selon l'expression bien venue de Judith Ginsburg. Le deuxième point d'achoppement est plus grave : non seulement le prince, qui devrait être un modèle de vertu, est un débauché, mais il est aussi un meurtrier. C'est bien entendu de Britannicus qu'il est ici question. Fils de Claude éloigné du pouvoir, il meurt mystérieusement en 55, un an après la prise de pouvoir par Néron. Les auteurs antiques ont livré un récit clair, circonstancié, des conditions de l'empoisonnement [[100]]. Le problème est que leur conte ne tient pas : médicalement, il a été prouvé que le crime n'était pas possible, puisque la mort rapide narrée par les historiens latins est impossible, les Romains ne connaissant pas de poison foudroyant en petites quantités [[101]]. Malgré ces éléments prouvant le mensonge à tout le moins partiel des auteurs antiques, en particulier Tacite, les avis des biographes de Néron sont partagés : Edward Champlin [[102]], Jean-Michel Croisille [[103]], Miriam Griffin [[104]], Jürgen Malitz [[105]] et B. H. Warmington [[106]] sont partisans de la thèse de l'assassinat. Michael Grant [[107]] défend lui une position intermédiaire : il y aurait eu meurtre, mais ce ne serait pas Néron le coupable, bien plutôt une intrigue de palais.

En 59, Agrippine décède. Cette fois-ci, il y a unanimité entre les auteurs antiques [[108]] et les historiens [[109]] pour stigmatiser l'assassinat ordonné par le prince. Comment l'expliquer ? Trois séries de raisons sont envisageables : la première est celle mise en avant par Tacite, qui voit en Agrippine un obstacle à la pulsion sexuelle de Néron, désireux de répudier Octavie et de se marier avec Poppée, sa maîtresse. La deuxième est plus politique, et consiste à voir en cet acte une volonté de libération montrée par Néron, volonté de ne plus subir le joug maternel et son immixtion dans les affaires de l'Etat. La troisième, plus « réaliste » voit en l'assassinat un acte de prévoyance : le prince aurait fait assassiner sa mère pour éviter d'être lui-même victime d'un complot qu'elle aurait fomenté. Un point est étonnant dans la mise en scène de l'assassinat, plus précisément sur la mise en scène de la première tentative, qui a connu un échec, celle dite du « bateau magique ». Il est permis de se demander dans quelle mesure elle ne satisfait pas où goût esthétique presque théâtral des auteurs du début du IIe siècle ap. J.-C. : pour faire subir à sa mère un « accident mortel », Néron aurait tout aussi bien pu mettre en œuvre une opération à la fois moins lourde et plus efficace. Quoi qu'il en soit, en 59, Néron est, selon les auteurs antiques, matricide, fratricide, incestueux, débauché. Et l'empire est entre ses mains.

Sur une périodisation du néronisme

La période 59-68, allant de la mort d'Agrippine à celle de son fils, est riche de ruptures majeures dans le principat néronien. La répudiation d'Octavie et la mort de Burrus en 62, l'incendie de Rome en 64, la conjuration de Pison en 65, le voyage en Grèce en 66, toutes ces dates pourraient être retenues comme points de cassure, comme césures chronologiques. Plutôt que de privilégier une approche strictement chronologique, malheureusement bien vaine et bien aveugle dans l'analyse des processus historiques, il est plus adapté de choisir, pour étudier ce moment charnière de la « République impériale », trois thèmes qui, dans l'ensemble, permettent une compréhension aussi complète que possible de la complexité du phénomène néronien.

Une interprétation politique des choix de Néron

On peut tout d'abord noter durant ces neuf années la volonté manifestée par le prince de créer un « principat populaire », s'il est possible de s'exprimer ainsi. Paul Veyne, dans son ouvrage L'Empire gréco-romain [[110]], a défini la singularité du néronisme comme essentiellement politique. Selon lui, le fondement politique du modèle du principat consiste en l'alliance entre le pouvoir, représenté par le prince, et les classes dirigeantes. Et Néron aurait rompu avec cette vision du régime en niant la communauté d'intérêts entre les notables et le pouvoir impérial, et en voulant s'allier avec la « plebs sordida » [[111]], les couches les plus humbles de la société romaine. Quelles formes cette politique de rupture a-t-elle pu prendre ? Pour commencer, celles d'une politique littéralement favorable au peuple. Néron a dispensé généreusement l'argent du trésor en faveur des citoyens romains, sous forme de distributions de numéraire et de blé [[112]]. Il a même représenté sur un sesterce daté de 65 une scène de congiaire [[113]]. Il donne au peuple de nombreux divertissements [[114]], instaurant même de nouveaux concours particulièrement fastueux, en 59, les Neronia, qui sont à la frontière des Jeux romains (le ludus) et des épreuves grecques, le certamen [[115]]. Il mène aussi une politique de grands travaux : les thermes et le gymnase [[116]] de Néron en 62, puis, avec l'incendie de Rome, en 64, une gigantesque campagne de reconstruction est mise en place, notamment avec la Domus Aurea, que l'on évoque souvent, mais aussi avec la réédification des rues et des maisons dans des conditions meilleures. Cette politique a deux conséquences majeures.

Tout d'abord, l'amélioration de la qualité de vie de la plupart des citoyens romains et, d'autre part, le fournissement à la plupart d'entre autres, sans travail, d'une activité rétribuée par l'Etat : la reconstruction des bâtiments détruits ou l'édification des monuments à construire. Et elle a pour corollaire l'accroissement de la gloire du Peuple Romain, auquel les habitants de la Ville sont si sensibles. Pour la séduire, outre les décisions déjà mentionnées, Néron emploie trois moyens principaux. Premièrement, la démagogie : c'est sans doute ainsi qu'il faut interpréter la persécution des Chrétiens, rendus coupables d'un crime qu'il n'avait pas commis, l'incendie terrible qui a touché douze des quatorze régions augustéennes [[117]]. La grande question que l'on peut se poser sur le texte de Tacite [[118]] qui rapporte la persécution et évoque ses raffinements, c'est de savoir s'il n'est pas une interpolation tardive, datant du temps de l'Empire chrétien. Jean-Charles Pichon, dans un ouvrage de 1961 qui a fait scandale, Saint Néron, a défendu cette thèse [[119]]. Si la plupart des positions soutenues par l'écrivain ne sont pas tenables en vérité, celle-ci a retenu plus d'attention, d'autant que Tacite est le seul à mentionner cet événement avant les auteurs chrétiens, dont Eusèbe de Césarée. Elle a notamment été défendue, sous une forme bien entendu différente [[120]], par Charles Saumagne, qui a été Professeur à l'Université française de Tunis, à l'époque du protectorat, et naguère un des grands spécialistes de la romanité. Ensuite, une propagande très développée : pour prendre un exemple particulièrement significatif, Néron a monnayé en quantités considérables de petites dénominations, le sesterce, le dupondius, l'as, et même le semis et le quadrans, dont l'usage était surtout destiné au peuple bien plus qu'à une quelconque aristocratie. Et ces monnaies, frappées en grande partie à partir de 64, sont souvent d'une incroyable qualité tant dans la recherche iconographique que dans la finesse de l'exécution. On peut considérer sans grand risque d'erreur que ce sont les couches populaires de la société qu'il cherchait ainsi à atteindre, en montrant à leurs yeux éblouis le faste du prince et la grandeur de Rome. Enfin, Néron a défendu une politique d'intégration sociale particulièrement rare durant le principat et pendant tout l'Empire, et donc d'autant plus remarquable. Son principal conseiller et son Préfet du Prétoire après la mort de Burrus en 62, c'est Tigellin, issu d'un milieu peu élevé [[121]]. Par ailleurs, Françoise des Boscs-Plateaux a montré dans son étude sur la promotion sociale des Hispaniques et leur rôle politique d'Auguste à Hadrien que Néron avait voulu se créer un cercle de proches composé essentiellement de provinciaux, notamment d'Hispaniques [[122]]. Cette politique sociale, que d'aucuns qualifieraient de « démagogique », a-t-elle eu du succès, a-t-elle valu à Néron un surcroît de popularité ? Les auteurs antiques essaient de le masquer autant que possible, mais la réponse est « oui ». Suétone en témoigne [[123]], avec animosité contre cette plèbe qu'il considère si malléable et si stupide. Un graffito de Pompéi manifeste aussi cette adulation qu'éprouve le peuple envers « son » prince : sur un mur est écrit « Neroni feliciter », « Vive Néron ! » [[124]].

La contrepartie de cette politique « démocratique » du fils d'Agrippine est l'amoindrissement des privilèges des notables, amoindrissement qui, lui aussi, doit faire chaud au cœur des plus défavorisés dans la société romaine. Cet abaissement des élites traditionnelles de la Ville prend trois formes. La première est la création de nouvelles classes dirigeantes. Elle se produit par l'élévation sociale d'un certain nombre de citoyens romains, mais aussi d'autres manières. En particulier, le prince tend à créer une nouvelle noblesse, fondée sur d'autres critères que l'ancienne aristocratie tardo-républicaine et impériale. Le cas des Augustians est significatif à plus d'un titre [[125]]. Cette sorte de confrérie rassemblant des personnes choisies parmi les meilleures familles pour soutenir le prince dans ses entreprises a été caricaturée par les auteurs antiques, qui n'y ont vu qu'un moyen pour un dément de se procurer des spectateurs bienveillants. En fait, c'est de tout autre chose qu'il s'agit : les anciennes élites sénatoriales ayant montré leurs limites, ayant été avilies par le prince [[126]], il lui est nécessaire d'assurer leur renouvellement. Or ces Augustians, formés sur le modèle des « paides basilikoi » des royaumes hellénistiques, sont, littéralement, les « hommes de l'Auguste ». A cette dénomination on voit bien que le renouvellement des élites n'est que partiel, comme le prouve aussi leur recrutement : ce n'est pas une mystique du roi que Néron met en place, mais une mystique de l'Auguste. Ainsi, plutôt que de voir, avec Eugen Cizek, dans le mouvement néronien de modification des élites une « anticivitas » [[127]], il est peut-être préférable de l'interpréter dans le sens d'une « ciuitas noua », qui serait toujours « ciuitas », mais n'en serait pas moins « noua ». Il faut aussi remarquer le fait que le prince a pour objectif de remplacer la noblesse romaine par lui-même. On rejoint en ce sens l'interprétation de Paul Veyne : la « soupape de sécurité » représentée par l'aristocratie sauterait, et laisserait place à une relation directe entre le chef et son peuple. De nombreux jugements ont été prononcés par les historiens sur la mutation profonde de la société romaine que supposerait un tel changement [[128]]. Mais c'est vite oublier que c'est là une tendance lourde de la politique romaine de la fin de la République et des débuts du principat que, au fond, de s'approcher de plus en plus de l'autorité charismatique telle que l'avait définie Max Weber [[129]], fondée sur un accord total entre le chef et ses « sujets », avec un caractère religieux et eschatologique marqué.

Comment cette volonté s'est-elle manifestée sous Néron ? Par l'exhibition du prince, qui était visible et en même temps si lointain, un peu à la manière des aristocrates romains. Ensuite, le prince a pris la place de protecteur (patronus) que jouaient les notables romains, facilitant la vie de plébéiens en échange de leur soutien politique : de là proviennent les décisions qualifiées de « sociales », et qui ont aussi et surtout pour fonction de « court-circuiter » la noblesse. Enfin, en s'emparant directement des biens des nobles : ainsi Pline l'Ancien [[130]] rapporte-t-il que Néron confisqua les terres des cinq plus riches propriétaires terriens d'Afrique. Mikhaïl Rostovtseff [[131]] considère qu'il y a là de sa part expression du mouvement du Ie siècle ap. J.-C. vers la concentration des propriétés terriennes des mains de l'aristocratie entre celles du prince. La troisième manifestation de cette « politique populaire » menée par Néron, c'est la lutte presque physique contre les anciennes élites romaines. L'opposition entre le prince et le parti sénatorial est latente jusqu'en 62, malgré un certain nombre d'éléments de discorde. Nous sommes largement tributaires pour ces récits de la narration tacitéenne. Rubellius Plautus, parent du dernier des Julio-Claudiens, complotait pour être à la tête de l'Etat. Il est exilé sur ordre du prince [[132]]. Antistius Sosianus, préteur en exercice, véhiculait des moqueries contre Néron [[133]]. Pour infraction à la lex de maiestate, il est passible de la peine de mort. Mais le Sénat, mené par Paetus Thrasea, dans un vote de convenance, décide de le condamner à l'exil, choix auquel le prince se rallie. Cette clémence des sénateurs prouve combien ils ne s'identifient pas totalement aux intérêts de son chef, le princeps senatus. Il ne faut toutefois pas oublier la partialité de l'information tacitéenne. Mais l'année 62 représente un triple tournant. Pour commencer, Burrus meurt, laissant Sénèque seul conseiller de l'ancienne équipe de gouvernement, Sénèque qui, petit à petit, s'éloigne des rênes du pouvoir [[134]], laissant place à de nouveaux proches du prince. Ensuite, Néron répudie Octavie et prend pour épouse Poppée[[135]]. Elle est issue d'une famille de notables pompéiens, mais en aucun cas n'est une aristocrate romaine de pure souche. Pire, on lui prête un intérêt coupable pour le judaïsme [[136]]. C'est donc une union en tout contraire aux préceptes des élites de la Ville… Enfin, Néron commence à réprimer les complots du camp sénatorial : il fait mettre à mort Sylla, son cousin, et Plautus, qui avaient tous deux été auparavant exilés [[137]].

Selon Eugen Cizek [[138]], la résistance au néronisme est essentiellement intellectuelle, et correspond grosso modo à quatre cercles : le cercle des pisoniens, partisans de Gaius Calpurnius Piso, de tendance épicurienne, le cercle des Annaei, avec les proches de Sénèque, ses frères, Mela et Gallion, son neveu, Lucain et leurs partisans. Il considère ce cercle comme l'un des plus importants, sinon le plus important. Outre celui-ci existe le groupe de Thrasea, composé de stoïciens opposant à l'hellénisation de Rome. Les disciples du philosophe Cornutus, évoqués par Dion Cassius [[139]], forment selon un groupe d'opposition à part. Si l'on peut émettre une remarque sur l'interprétation de l'universitaire roumain, c'est qu'elle ne tient pas assez compte des clivages politiques, considérant que ces complots, ces assassinats sont et ne sont que des questions de doctrine. Mais l'épicurisme prône l'éloignement de la vie politique [[140]], et le stoïcisme confie ses destinées à un « rector », chargé de « redresser » la vie mondaine selon les préceptes de l'univers [[141]]. Il semble donc peut-être plus juste de voir la majeure de ces conspirations non dans l'esprit mais dans les cœurs, plus juste de considérer que les causes de ces complots résident dans les questions plus directement politiques. Isabelle Cogitore a bien montré dans sa thèse La légitimité dynastique d'Auguste à Néron à l'épreuve des conspirations que ces dernières appartiennent presque tout le temps à trois types, dont deux sont représentés sous Néron : d'une part, la « conspiration républicaine », avec Paetus Thrasea [[142]], et, d'autre part, la « conspiration dynastique », avec Pison [[143]]. La distinction apportée par Isabelle Cogitore explique bien le fait que la répression ait été à double détente : tout d'abord, en 65, les meneurs de la conjuration de Pison, qui visait à lui offrir la place de Néron, ont été mis à mort. Le rôle de Sénèque a été assez trouble dans ses événements. Tacite rapporte comme un véritable tableau son suicide [[144]], Pierre Grimal considère qu'il a probablement participé, complice au moins par son silence, à la conspiration [[145]]. Mais ce n'est qu'en 66, un an plus tard, que sont acculés au suicide Thrasea et ses partisans, après un procès qui occupe quinze paragraphes du texte tacitéen, symboliquement, les quinze derniers qui nous soient conservés pour les Annales [[146]].

Pour résumer, le nombre de décès mentionnés par Tacite est relativement restreint, bien loin de ces massacres de la légende noire du prince doré… Quoi qu'il en soit, plutôt que d'y voir le résultat de la démence d'un prince affolé, si peu maître de lui-même, il est possible de l'interpréter doublement. Tout d'abord, comme l'élimination, à la manière d'Auguste, d'une partie des opposants au régime. Ensuite, comme une mesure éminemment politique, au sens le plus fort du terme, comme une étape vers la régénération des élites voulue par Néron. Quelles indications les sources antiques nous donnent-elles pour nourrir cette interprétation ? Les monnaies de l'époque nous invitent à l'accepter. Hubert Zehnacker, dans une communication aux Entretiens de la Fondation Hardt, communication prononcée le 30 août 1986 et intitulée Tensions et contradictions dans l'Empire au Ier siècle, Les témoignages numismatiques, a souligné avec juste raison que Néron a exploité l'échec de ces conspirations dans son iconographie numismatique [[147]]. Nous souhaiterions ajouter quelques détails : les deux manifestations de ce succès indéniable du principat néronien sur les monnaies sont deux types de revers, l'un [[148]] représentant Jupiter, le foudre en main, avec la légende IVPITER CVSTOS (« Jupiter le protecteur ») et l'autre [[149]] un denier avec l'allégorie et la légende SALVS (« la Santé », peut-être ici plus « la chance »). Notons que ces deux types représentent des divinités traditionnelles : quoi de plus romain que Jupiter ? Et Salus est une allégorie divinisée de longue date, protectrice d'Auguste lui-même [[151]]. Néron fait de ces déités anciennes les symboles de son succès : il se présente comme le défenseur de la tradition contre, justement, les traditionalistes. C'est dire combien ces monnaies sont programmatiques, et témoignent de sa volonté de renouveler les élites, d'être lui-même le garant de la romanité, mais de la romanité sous un autre mode. Par ailleurs, il est remarquable que ces deux types, Jupiter et Salus, sont réservés aux aurei et aux deniers, en métaux précieux, et donc destinés bien plus aux classes dirigeantes qu'aux couches sociales peu favorisées, comme une sorte d'avertissement. Cette interprétation politique explique bien entendu beaucoup. Mais elle est loin de rendre compte de tout ce que représente le néronisme de ces années. Il faut lui ajouter une vision culturelle, qu'il sera nécessaire d'explorer.

Le désir d'Orient

Il faut revenir, pour commencer, au « charisme » de Max Weber : ce phénomène surgit, selon l'éminent sociologue, quand les élites sont en déperdition. C'était le cas sous Néron. Il a pour manifestation le caractère extraordinaire, unique, de l'expérience que représente le « chef charismatique », comme force de renouvellement culturel. Néron était-il, sous toutes ses coutures, « charismatique » ? L'explication culturelle permettra d'envisager pleinement cette question. Un fossé dans lequel se sont perdus nombre d'historiens du fait néronien est celui de la confusion entre la Grèce et l'Orient. Or la différence dans l'esprit des Romains entre ces deux entités géographiques est immense : si la Grèce participe d'une « altérité incluse », selon l'expression de Florence Dupont [[152]], l'Orient est, pourrait-on dire, une « altérité exclue ». Il est essentiel de rendre compte successivement des deux interprétations, celle qui voit en Néron un oriental, et celle qui voit en lui un « grec manqué ». La thèse d'un « Néron oriental » a été défendue notamment par Gilbert Charles-Picard, dans son ouvrage Auguste et Néron, Le secret de l'Empire et par Eugen Cizek dans sa biographie, Néron. L'ont aussi soutenue Pierre Grimal et Guy Achard, par exemple. Quels sont les éléments qui vont dans le sens de cette posture ? Ils sont de trois ordres : culturels, religieux et politiques, si tant est que l'on puisse, dans la Rome antique, distinguer ces trois domaines.

A ses demeures, Néron donne une consonance nettement orientale. L'architecture de sa Villa de Subiaco [[153]] est profondément marquée par l'Orient. Plus encore, le palais qu'il édifie sur l'Esquilin, le Palatin et le Caelius, la Maison d'Or (Domus Aurea), présente par son gigantisme et sa splendeur un caractère typiquement oriental, pour un esprit romain. Ses jardins luxuriants, en particulier, témoignent d'un art de vivre bien éloigné de la frugalité et de l'esprit vieux-romains [[154]]. Selon Gilbert Charles-Picard [[155]], c'est en fonction d'eux que le palais a été construit. A son avis, leur magnificence hors norme évoque une vie affranchie de toute contrainte éthique. Suétone a livré une description célèbre de cette résidence d'exception [[156]], dotée d'un faste hors du commun, d'un faste extraordinaire, digne d'un sur-homme. Cela rejoint un des autres éléments de cet orientalisme culturel : la débauche, qui a été interprétée comme une marque de sur-humanité. Néron, en bravant les interdits, en se détournant de la morale, affirmerait qu'il est radicalement autre, radicalement supérieur aux autres [[157]]. L'assassinat de Poppée [[158]] dont il est présenté comme l'auteur serait une marque de l' « amoralisme de Néron » (Gilbert Charles-Picard), qui se manifesterait aussi par les performances théâtrales du prince, qui auraient pour fonction de montrer qu'il est au dessus des hommes, qu'il peut dominer le mépris qu'éprouvent les Romains envers les acteurs et les forcer à approuver ce qu'ils haïssent, parce que c'est lui qui l'accomplit ; de là découle une interprétation possible des Augustians, qui seraient la manifestation d'une contrainte imposée à l'aristocratie par Néron, contrainte de changer de valeurs, de passer de Rome à l'Orient. Les Iuuenalia, célébrées en 59, fêtes en l'honneur de la Jeunesse, cérémonies religieuses devenues scènes de débauche, seraient le prodrome de ces mutations profondes et le symbole d'une civilisation « rajeunie », littéralement, « rajeunie » en échappant aux règles d'une morale ancienne et vieillie [[159]]. Ce rajeunissement de la culture passe aussi par un rajeunissement de l'art, rajeunissement profondément lié à l'Orient, dans un monde dont il apparaît comme l'origine : le prince est représenté dans ses portraits comme jeune, ses portraits qui sont inspirés très nettement de l'art oriental, notamment égyptien [[160]]. Sa mèche, en particulier, témoigne de cette influence. La littérature elle-même se montre en mouvement, chez Lucain comme chez Pétrone [[161]], sous la forme du « baroque ».
 

A cette orientalisation culturelle, il est nécessaire d'en ajouter une autre, religieuse, cette fois-ci, qui a deux faces. La première est l'initiation aux cultes orientaux. Pline l'Ancien, dans un texte célèbre [[162]], raconte que Tiridate initia Néron aux Mystères de Mithra lors de sa venue à Rome, en 66. Mais l'on considère souvent [[163]] que cette anecdote est apocryphe. Trois savants cependant, ardents partisans de la thèse de l'orientalisme néronien, Hans-Peter L'Orange, Gilbert Charles-Picard [[164]] et Eugen Cizek [[165]] prennent parti pour la réalité de l'événement. A leur détriment, on se permettra de noter que Pline est un ennemi personnel de Néron, haut fonctionnaire dans l'administration des Flaviens (il commande la flotte à Misène) et a donc tout intérêt à répandre des fables sur la prétendue orientalité de l'ancien prince, si populaire. Mais Hans-Peter L'Orange [[166]] a intégré son interprétation du passage plinien à une réflexion d'ordre plus général sur le religieux sous le « néronisme » et sur son influence dans la Domus Aurea. L'universitaire danois part d'une étude précise de la rotunda, la « salle à manger principale » [[167]] : c'était une salle ronde, dont la description est livrée par Suétone [[168]], chef-d'œuvre des architectes Severus et Celer, dont le plafond, peint à l'image des cieux, était sans cesse en mouvement. Hans-Peter L'Orange rapproche sa structure des salles à manger des shahs d'Iran, des Parthes et considère que Néron s'en est largement inspiré. Remarquons toutefois que Suétone est le seul à évoquer ce lieu. Dans son étude, L'Orange rapproche la théologie solaire de Néron du mazdéisme, et pense que celui-ci, à la manière du « roi des rois » est le délégué sur terre de son dieu, qui ne serait plus alors une divinité romaine. Et c'est dans cette théologie solaire que réside, aussi, l'orientalisme du prince [[169]]. Selon Gilbert Charles-Picard, c'est l'Egypte que Néron porte dans son cœur : Apollon cache Hélios, et Hélios cache Rê, le dieu égyptien du soleil, protecteur de pharaon. Il oppose la figure augustéenne d'Apollon, hiératique, conservateur, de la vision qu'en a Néron, un Apollon oriental, expressif, épris de désordre, pris d'une sorte de délire bachique. L'incarnation qui a lieu au théâtre, où Néron joue à être Apollon, c'est-à-dire procède à une divinisation de lui-même, participerait de cet idéal religieux hellénistique. Le Colosse qu'il fit construire devant sa demeure, Colosse à l'imitation de Rhodes et le représentant en Hélios est une autre manifestation de sa divinisation [[170]]. Sur les aurei figure la reproduction de cette statue, qui apparaît comme une gloire du règne, et qui montre un homme, que l'on identifie à Néron, drapé, revêtu de la couronne radiée, symbole de divinité [[171]]. Des dupondii de bronze portent justement à leur avers le portrait du prince radié à droite, cette fois-ci nettement reconnaissable grâce à la légende qui mentionne son nom et ses titres [[172]]. L'interprétation la plus courante de ce type de droit [[173]] est d'y voir un stigmate de la divinisation solaire dont aurait bénéficié le dernier des Julio-Claudiens. Selon Eugen Cizek [[174]], Néron ouvre directement la voie à la suite de l'Empire parce qu'il s'est lui-même proclamé dieu, de son vivant, ce qui, selon lui, témoigne d'une part de l'héritage d'Antoine et d'autre part de l'influence de l'Orient. Par ailleurs, le jugement des historiens défenseurs de la thèse orientale sur la psychologie du prince est double : on souligne sa mégalomanie [[175]], mais on reconnaît de la cohérence à son projet [[176]].
 
 

Outre le projet religieux, un certain nombre d'historiens ont surtout trouvé que l'attirance pour l'Orient résidait chez Néron dans sa vision politique. Sa divinisation en fait partie, puisque elle fait de lui une entité située dans un autre monde, bien au-delà, bien au-dessus des autres hommes. Il est la « source de tous les biens » [[177]], comme l'appelle un document égyptien, qu'il ne faut cependant pas surestimer, puisque il s'adresse à des sujets qui sont considérés comme les esclaves du prince. Par quels canaux cette transformation hellénistique du pouvoir passe-t-elle ? Tout d'abord, par la mise en avant d'un certain nombre de qualités appliquées à Néron, qualités qui sont souvent liées à l'éthique des royaumes hellénistiques. Le rôle joué dans ce cadre par la Vertu est considérable : valeur ambiguë, elle à la fois la uirtus latine et l'arétè grecque, mot employé au IIIe siècle av. J.-C., et qui connote directement l' « excellence », la « suprématie » (qui seraient souvent de meilleures traductions). Néron apparaît comme le « maître de la terre et de la mer », comme il voulait se faire appeler [[178]]. Dans le cadre de cette « excellence », on a souvent cité comme pièce du dossier l'inscription d'Akraiphia [[179]], par laquelle le fils d'Agrippine accorde l'indépendance aux Grecs. En effet, dans ce texte qui nous a heureusement été conservé, Néron s'adresse au public d'Hellènes réunis à Corinthe et leur annonce la faveur qu'il leur accorde. Il emploie à chaque détour de phrase la première personne, pour montrer que c'est lui qui prend la décision, décision inattendue et qui renforce d'autant plus son absolutisme. Contrairement à ses prédécesseurs, qui avaient associée leur famille dans les monnayages romains, qu'il s'agisse d'Auguste, de Tibère, de Gaius ou de Claude, Néron est seul, à partir de 56, à être représenté en buste sur ses monnaies, ce qui pourrait aussi contribuer, sans doute à cette autocratie dont il semble être le partisan et le metteur en scène. L'évergétisme est essentiel à cette conception du pouvoir, le prince, comme Ptolémée, est évergète, c'est-à-dire qu'il donne sans y être obligée, dans une logique de la « charis », de la « grâce » [[180]]. Il est celui qui donne sans attendre en retour : c'est dans cet horizon que pourrait s'expliquer toute la politique d'assistance à la plèbe [[181]], la reconstruction et l'assainissement de la Ville de Rome après l'incendie de 64. Dans l'inscription d'Akraiphia, il évoque une « faveur si inouïe que vous [les Grecs] n'auriez osé me la demander », ce qui met en évidence cette « charis » dont il est le généreux donateur. Son luxe et son extravagance, les Jeux qu'il donne aux Romains, font aussi largement partie de cette stratégie d'évergétisme [[182]]. Il améliore leur qualité de vie mais apparaît comme étranger à leur sort, très éloigné de leurs préoccupations, vivant justement dans un autre monde : ce sont exactement les manifestations de la « charis ». Et il semble que les Romains étaient réellement impressionnés par ces expressions incroyables d'une puissance inimaginable, qu'ils croyaient à la divinité de leur prince [[183]]. La manifestation théâtrale peut elle aussi être de l'ordre d'une « charis », puisque le prince offre quelque chose qui, de surcroît, est de l'ordre de l'inouï -un chef de l'Etat romain devenant autre que lui-même, incarnant un rôle- et du gratuit -il ne demande rien en échange de ses performances. Et, en se mettant sur scène, en se mettant en position de fournir une « charis » tout à fait extraordinaire, il se montre plus encore supérieur aux autres qu'il ne s'abaisse en « faisant l'acteur ». Il est véritablement un « acteur-roi ». Pour compléter l'omnipotence et l'évergétisme, il trouve en lui ce troisième signe d'une idéologie hellénistique qu'est l'imprévisibilité. Les textes sont nombreux à évoquer les excès de Cléopâtre [[184]], excès d'autant plus « é-normes » au sens étymologique qu'ils étaient inattendus. Néron, si l'on suit toutefois la thèse des partisans d'un orientalisme à outrance, s'inscrit dans cet héritage. Il court les trésors en Afrique [[185]], part en Grèce, dans le plus grand secret, fait perdre à Rome une source de l'or qui y afflue en « libérant » l'Hellade, il se débauche, il tue, tout cela est de l'ordre justement de l'inattendu, de l'imprévisible. Sa liberté est totale, et, dans cet horizon, il ne s'accorde aucune limite, n'est en aucun cas prévisible ou prévoyant, ce qui explique sa politique financière déplorable. Jean-Pierre Martin a souligné dans sa thèse [[186]] l'anesthésie qu'avait connu le concept de prouidentia sous le principat néronien, anesthésie que l'on peut aisément attribuer à cette imprédictibilité du roi hellénistique. On a donc vu, et ceci contribue justement à cet absolutisme oriental du pouvoir, que l'idéologie est calquée sur les Epigones, qu'il s'agisse des Séleucides ou des Lagides.

Mais Néron met aussi en place un pouvoir d'essence orientale. L'accès à sa personne est restreint, on entre dans un pouvoir de type aulique où les rares courtisans qui ont le bonheur d'approcher le détenteur du pouvoir sont eux-mêmes investis d'une immense puissance. L'arbitraire règne : Gaius Nymphidius Sabinus, fils d'affranchi, d'extraction humble, accède à la très enviée préfecture du Prétoire [[187]]. Les meurtres sont eux aussi, à leur manière, des manifestations de cet excès du pouvoir. Certes pas pour Pison ou Thrasea qui avaient comploté, mais bien plus pour nombre de personnes mises à mort pour si peu. L'une des principales marques de ce pouvoir orientalisé, marque que nous n'avons pas encore étudiée, est le changement du personnel politique : l'ascension sociale d'affranchis et d'hommes libres pauvres est rendue possible par les assassinats, et Néron choisit comme nouveaux membres de sa Cour impériale, titulaires d'offices, possesseurs d'une partie de son arbitraire, des hommes originaires de la partie orientale de l'Empire. Eugen Cizek [[188]] en a fait la prosopographie : Norbanus d'Alexandrie dirige le Trésor impérial à partir de 63, Tibère Alexandre, d'origine juive égyptienne, est préfet d'Egypte à partir de 66, en 62, Claudius Athenodorus est préfet de l'Annone. La plupart des affranchis chefs de bureaux de l'Etat viennent d'Orient, comme Polyclitus ou Helius. Comme on le voit, l'interprétation orientale est solide, et offre une clef utile. Son principal problème est qu'elle fait bien trop confiance aux sources littéraires, qui sont, pour le principat néronien, éminemment suspectes de partialité, sinon de mensonge. En fait, en fondant l'explication orientale, on fait le jeu des auteurs antiques, on tombe dans le piège qu'ils ont tendu à la postérité. Il ne faut pas prendre les historiens romains pour des historiens contemporains. Il n'ont pas de réel sens de l'objectivité et veulent à tout prix transmettre un message d'ordre moral : dans le cas de notre étude, la condamnation sans appel possible de Néron. Mais les valeurs ont changé. Pour une personne d'aujourd'hui, dire que Néron commettait des turpitudes inimaginables, était orientalisé, ce n'est pas le repousser à jamais du personnage, le condamner à une damnatio memoriae, c'est au contraire aiguiser son intérêt. En faisant ainsi, on comprend à la lettre le message des Anciens, tout en l'appliquant à contresens.
 
 

Quelle interprétation donner alors à cet exotique que l'on reconnaît dans le phénomène néronien ? Plus probablement que celle d'une « altérité exclue », la forme d'une « altérité incluse ». Le néronisme n'est sans doute pas un orientalisme, il est bien plus un hellénisme. C'est d'ailleurs ce qui tombe le plus sous le sens : Patrick Le Roux, dans son volume consacré au Haut-Empire romain en Occident, D'Auguste aux Sévères, affirme clairement que Néron a été inspiré par la Grèce [[189]]. C'est aussi l'opinion en particulier de B. H. Warmington, qui intitule un de ses chapitres « Néron, l'empereur philhellène » [[190]]. Il nous reste à déterminer comment et dans quelle mesure le principat du dernier des Julio-Claudiens est marqué en profondeur par l'exemple hellénique plutôt qu'hellénistique. Il faut remarquer que c'est à l'Hellade que Néron a accordé la liberté, et non à l'Orient, qu'il a toujours voulu soumettre. Son respect n'allait en aucun cas aux Orientaux, il allait aux Grecs -et si peu. Son action, symbolique et financière, en aucun cas politique, a attiré sur lui la sympathie de nombre de Grecs. Et même Plutarque, écrivant sous Trajan, considère que les fautes de Néron sont excusées par l'acte d'éclat qu'il a accompli en libérant son pays [[191]]. Le thème de l'agôn qu'a évoqué avec justesse Eugen Cizek [[192]] est, semble-t-il, bien plus proche de la tradition grecque même que d'une quelconque tradition hellénistique. La dimension agonistique du pouvoir néronien a trois manifestations principales. Tout d'abord, la création du certamen quinquennale en 60, création dont Jean-Paul Thuillier [[193]] a pu montrer qu'elle relève bien plus, aussi bien dans son esprit que dans sa pratique, de l'hellénisme que de la romanité, par sa périodicité et par les épreuves mêmes qui y sont disputées. Ensuite, par ses représentations théâtrales, où il intègre presque physiquement la littérature grecque. Lors de son séjour en Grèce, il a participé aux concours de la Période, notamment ceux d'Olympie [[194]], participant véritablement à l'agôn dans son sens le plus noble pour un Grec, celui de la compétition protégée par les dieux. Enfin, il a transformé la vie politique romaine en une gigantesque manifestation agonistique. De cette grande exposition néronienne, nombre de témoignages sont perceptibles. Par exemple, son triomphe, au retour de Grèce, en 67, triomphe somptueux comme il n'y en avait jamais eu, célébrant à Rome sa victoire dans l'agôn grec [[195]]. Il participe ensuite à des courses de char dans le Cirque Maxime [[196]]. Ses qualités oratoires et poétiques -réelles, à ce qu'il est possible d'en juger à partir des témoignages restants- lui permettent de véritablement s'inscrire dans le travail rhétorique de l'agôn [[197]]. Il est certain que Néron aimait la Grèce : c'est là qu'il y a fait son voyage, sorte de « Grand Tour » avant l'heure. Mais son voyage avait aussi peut-être une finalité politique : affirmer le polycentrisme de la culture impériale, polycentrisme qui est construit, mutatis mutandis, en parallèle à la structure des cités dans l'Hellade divisée. Redonner vigueur et à une culture grecque ancienne mais décadente et à la romanité, telle semble avoir été la finalité de ses pérégrinations. Religieusement, Néron nous paraît bien plus proche de la Grèce que de l'Orient : il s'est représenté sous les traits d'Apollon triomphant [[198]], en particulier sur ses monnaies, et a associé son image à la fois à celle du fils de Zeus et à celle d'Hélios, qui est ou le fils d'Apollon, ou une des épiclèses. Il n'en demeure pas moins que l'époque était apollinienne. Mais si le culte avait été seulement apollinien, on eût pu en conclure qu'il pouvait effectivement s'agir d'une identification Apollon-Hélios-Rê-Mithra. Or ce n'est pas le cas. Comme dans la plus pure tradition grecque, comme à Delphes où le temple, pendant une saison, appartient au dieu des Bacchanales, Apollon ne saurait se penser sans Dionysos. Or ce dernier est présent dans l'imagerie officielle du principat, c'est-à-dire dans la Maison d'Or. C'est le grand mérité d'Yves Perrin de l'avoir, entre autres, particulièrement souligné : il a montré les satyres, les grappes de raisin et autres symboles dionysiaques qui habillent les murs [[199]]. Mais il ne faut pas tirer de conclusions hâtives : ce n'est pas parce qu'il y a Dionysos que le principat est forcément le cadre d'une dépravation suraiguë. La pensée grecque associe les deux dieux, Apollon et Dionysos, les deux contraires et pourtant si semblables, pour qu'ils forment un équilibre. Contrairement à ce que l'on aurait pu penser, cet équilibre, Néron le respecte dans les représentations du règne. Le dernier des Julio-Claudiens a fait frapper des monnaies où figure Apollon en citharède, selon son image hellénique [[200]]. Miriam Griffin considère comme « artificielle » [[201]] la distinction entre « hellénique » et « hellénistique ». Son avis n'est pas totalement partagé par les philologues : au sein d'une même civilisation, il nous semble patent qu'il existe plusieurs branches. Pour la culture grecque, l'une de ses ramifications est bien la civilisation « hellénistique », mais elle n'est pas la seule. L'héritage grec est multiple, pour les Romains comme pour leurs successeurs, et ne saurait se résumer à deux siècles de sa si longue histoire. Néron, bon connaisseur du grec, était donc un philhellène. En cela, il était le fils de toute une tradition chez les Julio-Claudiens. Son grand-père, l'illustre Germanicus [[202]], peu suspect quant à lui de dérive délirante, avait traduit les Phénomènes d'Arate et écrit diverses petites pièces en grec recueillies dans l'Anthologie palatine [[203]]. Cette communauté et la différence qu'a connu leur traitement dans les sources littéraires nous prouvent une fois de plus, si besoin est, l'extrême partialité des auteurs antiques, qui n'hésitent pas à passer sous silence ce qui ne les intéresse pas ou les gêne dans leur démonstration et à souligner avec insistance ce qui étaie et corrobore leurs thèses. Et un élément qu'ils ont délibérément passé sous silence et qu'il nous faudra souligner, c'est la volonté sans faille montrée par Néron d'imiter le modèle augustéen.

Vers un néronisme augustéen…

Cet augustéisme néronien constitue l'un des éléments les plus saillants et pourtant l'un des moins étudiés d'un principat d'exception sur lequel tant a été écrit. Parler d'un Néron augustéen peut sembler bien paradoxal, mais n'est paradoxal qu'a causes des nombreuses scholies qu'a connu cette décennie singulière qui forme le règne du dernier des Julio-Claudiens. Les Actes des Arvales, un document souvent utilisé pour les cinquante premières années du principat, fournissent de précieux indices. Pour les derniers moments, les années 66-68, ils ont été conservés, à tout le moins partiellement. Or sur ce calendrier des fêtes, Néron est célébré comme un « nouvel Auguste » [[204]]. Ce choix ne saurait avoir été sans au minimum le consentement de l'individu en question. Néron, fils d'Auguste contre son gré, ce n'est pas pensable. Mais Néron, fils d'Auguste de plein gré, revendiquant l'héritage du fondateur, si cette hypothèse paraît au premier abord farfelue, on verra que, au contraire, elle présente une grande pertinence. Elle se décline sous trois formes essentielles qui semblent établir combien était grande la dette que Néron a reconnue être la sienne envers son arrière-arrière-grand-père, trois forme qui rendent compte de ce que Stéphane Benoist a justement nommé une « propension à l'imitatio Augusti » [[205]] : culturelle, religieuse et politique. Commençons par la culture. On a souvent évoqué le caractère extraordinaire du Colosse de Néron, à l'exemple de Rhodes, Colosse solaire et manifestation d'une divinisation du prince de son vivant. Cette exceptionnalité, qu'il serait vain de chercher à nier, amène parfois à y voir un hapax, ce qui est faux. Les fouilles ont montré que, à Rome même, Auguste s'était fait ériger une statue monumentale, proche de cette éthique et de cette esthétique du gigantesque, de l'immense, du sur-humain. Aujourd'hui encore, il est possible pour qui se rend dans la Ville de voir les vestiges laissés par cette sculpture [[206]]. C'est que l'art tout entier des temps néroniens est le fils légitime de l'époque augustéenne. Aussi bien le Colosse que d'autres représentations. On aura certes raison d'opposer ce qui apparaît comme la « raideur » augustéenne à l'expressivité néronienne, mais cette opposition porte en elle quelque chose de factice. Paul Zanker, le grand spécialiste d'Auguste, a souligné à juste titre la pluralité, sinon la multiformité de l'augustéisme [[207]]. Après la sculpture, il est bon de s'intéresser de plus près à la littérature. Si le thème augustéen sature les références d'un Sénèque notamment, l'écriture du trouble poétique employée par certains auteurs du tournant du Ie siècle, le mystère de la création qui apparaît comme un des thèmes de l'hypertexte néronien, qu'il s'agisse des Elégies d'Einsiedeln, de Calpurnius Siculus ou de Lucain, ou encore d'Antiphile de Byzance, ce thème se retrouve dans l'époque augustéenne. Le perpétuel questionnement du réel à partir de la mythologie, qui est au cœur de l'entreprise de la Pharsale, la sacralité de la mission poétique, ces deux éléments sont très présents dans l' « âge d'or » du principat [[208]]. La peinture maintenant : on a souvent opposé l'ordre de l'Auditorium de Mécène aux influences bachiques de la Domus Aurea. Il nous semble au contraire évident qu'il existe une parenté entre l'art pictural augustéen et son équivalent néronien. On peut noter, avec Jean-Michel Croisille [[209]], que, si le Troisième Style pompéien naît avec Auguste, le Quatrième Style est néronien. Est-ce là une coïncidence ? Non, sans doute. Le néronisme est une force de renouvellement, mais une force de renouvellement de l'augustéisme, et qui ne saurait exister sans lui, ou à tout le moins sans un important substrat augustéen. Une autre différence fondamentale avec l'augustéisme pourrait être la conception de l'hellénisme. Or il n'en est rien, puisque il existe une grande similitude, sinon une communauté entre la conception augustéenne et la conception néronienne du rôle que la Grèce a à jouer. Reprenons quelques instants le texte de l'inscription d'Akraiphia : Néron s'y montre en seigneur et maître. La réflexion a parfois dévié de cette suprématie du prince, jusqu'à y voir un témoignage de la royauté hellénistique qu'aurait voulu instaurer le fils d'Agrippine. En percevant le contexte du discours, il est possible d'être amener à formuler une hypothèse différente : Néron, prince de Rome, parle à ses sujets grecs. On a très souvent souligné [[210]] le divorce existant dans l'Empire entre Rome et l'Italie d'une part, le reste du monde romain d'autre part. C'est exactement ce divorce que Néron met en place dans son allocution : il est le Romain qui parle à des Grecs. La libération de l'Hellade s'inscrit en fait dans toute une tradition à la fois rhétorique et culturelle. Pour finir, l'acte du dernier des Julio-Claudiens n'avait rien de si exceptionnel que l'on a pu le penser. C'est ce que fait remarquer avec justesse Fergus Millar, en rappelant que, avant lui, Auguste déjà avait accordé la liberté financière à des cités, avec une grande libéralité [[211]]. La notion d'agôn qui a été attachée à et qui a entaché Néron n'était pas inconnue de son arrière-arrière-grand-père, loin de là. Dans ses manifestations publiques, dans sa conception de l'espace et des fastes de l'Etat, dans le rôle qu'il s'attribuait lui-même à sa tête, dans cette immense mise en scène du principat, Auguste, lui aussi, obéissait à une conception agonistique de la vie [[212]]. La différence entre leurs visions n'est pas si grande que l'on a pu le croire. Il est évident qu'Auguste n'est pas Néron, et que Néron n'est pas Auguste. Mais ce qui semble tout aussi évident, c'est que Néron est un « nouvel Auguste », jusque et y compris dans son rapport à la monarchie hellénistique. Nicolas de Damas, écrivant une « biographie autorisée », comme on dirait aujourd'hui, d'Auguste, rapporte [[213]] que son beau-père Lucius Marcius Philippus disait descendre de Philippe de Macédoine, et donc être parent d'Alexandre le Grand. Ce détail, qui peut tout aussi bien être un « petit fait vrai », a, pensons-nous, une portée symbolique. Auguste, en tant fils par alliance de Philippus, est son héritier, mais il n'est pas de son sang, et il n'a de cesse d'affirmer son césarisme. Auguste, en tant que fils par alliance de la monarchie hellénistique, est son héritier, mais pas naturellement, et il n'a de cesse d'affirmer sa romanité. Cette dialectique entre romanité et hellénisme, c'est celle de Néron, comme c'est celle d'Auguste. Un troisième élément culturel confortera notre interprétation d'un Néron fils d'Auguste, c'est celui de la circulation monétaire. Néron a, le premier depuis Auguste, réintroduit un véritable trimétallisme [[214]] : Tibère avait monnayé principalement de l'or et de l'argent, Gaius, du bronze, tout comme Claude, alors que le fondateur avait, dans les ateliers d'Espagne, de Gaule, d'Orient et de Rome, offert à tout l'Empire, l'or, l'argent et le bronze. La baisse du poids des monnaies d'or, lors de la réforme de 64, a souvent été, notamment par Pline l'Ancien [[215]], attribué à la mauvaise qualité de la gestion des Finances publiques par Néron. En fait, il semble qu'elle appartienne plus à une ré-organisation générale de la frappe des monnaies. Néron, voulant revenir au trimétallisme augustéen, mais n'ayant pas les moyens de le faire aux anciens poids et aux anciennes mesures, a préféré diminuer le poids de l'aureus. Mais on remarquera que c'est exactement ce qu'Auguste avait fait, alors qu'il ne pouvait plus bénéficier du fruit des conquêtes et des pillages, puisque il faisait entrer Rome dans la Pax Romana. La diversité des types néroniens est, elle aussi, proche du foisonnement augustéen. On notera de surcroît qu'un certain nombre de représentations sont reprises directement du monnayage du fondateur de la dynastie [[216]]. Néron, héritier d'Auguste, un certain nombre d'indices étaient et corroborent cette thèse, dans le domaine culturel.

Il demeure nécessaire de confirmer cette première impression en analysant l'impact qu'a pu avoir l'augustéisme dans la religion publique sous Néron. John Scheid, qui l'a étudiée de près [[217]], a remarqué que, contrairement à d'autres domaines, elle semblait, dans sa pratique, ne pas avoir été autant touchée que d'autres aspects de la politique romaine. En somme, la vie religieuse sous Néron n'est pas aussi « néronienne » que l'on a pu l'affirmer. Pour donner à cette affirmation toute sa vigueur, il faut prendre en compte trois aspects des cultes sous le dernier des Julio-Claudiens, trois aspects qui révèlent une incontestable imitatio Augusti. Le premier, et peut-être le plus patent, c'est l'hommage sans cesse rendu au fondateur du principat par son descendant. Jean Gagé, dans un article de la Revue archéologique, étudiait les manifestations de la divinisation d'Auguste. Il souligne que, souvent, Néron « imite littéralement Auguste » [[218]]. Le fils d'Agrippine évoque souvent sur ses monnaies « les divinités augustes », la Victoire et la Paix, dont Octavien avait fait sa marque de fabrique [[219]]. De la sorte, il n'a de cesse de payer le tribut dû à son aïeul. On a retrouvé des autels au Genius Augusti ou au Numen Augusti [[220]] qui évoque cette essence tout à fait singulière du prince, essence qui fait de lui, et ce dès Auguste lui-même, autre chose qu'un homme, plus qu'un homme. Ses deniers et aurei montrent la silhouette du fondateur, coiffé de la couronne radiée, avec la simple légende « Augustus », comme s'il était toujours vivant, comme s'il n'y avait que lui comme « Auguste ». Tous ces signes d'un hommage très marqué à l'augustéisme construisent une image de Néron bien éloignée de que l'on avait pu croire. Car cet hommage au premier des Julio-Claudiens, ce n'est pas simplement dans les premières années du principat, où l'on pourrait croire que c'est le fait de l'influence de ses conseillers, Sénèque, Burrus, qu'il le rend. Non, cet hommage traverse tout le principat, et les monnaies [[221]] précédemment évoquées datent des dernières années, entre 64 et 68. Ce n'est même que dans ces quatre derniers ans que la vision néronienne de l'augustéisme s'accomplit avec le plus d'éclat. Sur un as de bronze [[222]], il représente l'Ara Pacis, l'Autel de la Paix, qui est le symbole le plus fort de la dynastie augustéenne, construit par Auguste en hommage à la Domus Augusta, à sa « maison ». Michael Grant [[223]] a même été jusqu'à interpréter les très nombreuses monnaies frappées à partir de 64 comme une commémoration du décès d'Auguste, cinquante ans auparavant, commémoration qui prendrait la couleur d'un hommage rendu à l'inspirateur paradoxal du principat néronien. On a beaucoup parlé de l'idolâtrie qu'aurait voulu susciter Néron envers sa personne. De cela, aucune trace, ni ce n'est littéraire -et l'on sait combien ces sources sont douteuses, à tout le moins pour ce personnage contesté. Robert Etienne, qui a étudié le culte impérial en Espagne, a montré que, à l'époque de Néron, il avait connu un déclin [[224]]. Son interprétation est la suivante : les élites et les troupes d'Espagne n'auraient pas voulu honorer quelqu'un de la trempe du dernier des Julio-Claudiens. Mais le travail de Françoise des Boscs-Plateaux a quant à lui établi que les temps néroniens ont donné lieu à une réelle ascension sociale des citoyens hispaniques de l'Empire. Il semble donc, plutôt que de parler de déprise, possible d'envisager cette perte de vitesse du culte impérial comme le fruit d'une volonté du prince de le limiter et de le ramener à sa portion congrue. C'est également l'interprétation de Miriam Griffin, qui refuse l'idée d'une « monarchie divine » avec culte du roi [[225]]. Néron a cultivé plus l'ambiguïté que la clarté. S'il n'est pas exact de dire qu'il y a eu un culte hellénistique de la personnalité durant son gouvernement, il n'est pas plus exact de nier l'existence de tout culte. Il suffit de se rappeler le dupondius qui le représente avec la couronne radiée. Cela ne veut-il donc rien dire ? Vespasien, peu suspect d'orientalisme débridé, a repris cette symbolique, et l'on peut penser, sans grand risque d'erreur, qu'elle a surtout une valeur d'indicateur de dénomination monétaire. Néanmoins, si l'on prend au sérieux cette représentation et, surtout, si on la confronte à des bustes qui eux aussi portent la couronne radiée, il devient nécessaire de rendre définitivement -si cela est possible- compte de cette idée de culte du prince, perçu comme un dieu. Il ne faut peut-être pas exagérer le rôle symbolique de la couronne radiée. Il rappelle le Soleil. Et en cela se rapproche terriblement de l'augustéisme, sous deux formes. D'une part, Auguste a représenté sur son monnayage la divinité solaire [[226]], avec des traits rappelant étrangement les siens… D'autre part, ses portraits sculptés sont, même s'ils se rattachent à des types, d'une réelle variété, notamment dans les coiffures [[227]]. Peut-être Néron a-t-il voulu s'inscrire dans cette diversité. Le culte du prince, jusque et y compris dans ses aspects les moins clairs, présente un certain nombre de points communs au premier et au dernier des Julio-Claudiens. Cette approche augustéenne de la religion qu'a le fils d'Agrippine se manifeste aussi dans le culte tout à fait particulier réservé à Apollon. Auguste a été celui qui a fait entrer le dieu grec dans l'espace civique, en lui réservant un temple sur le Palatin. Le thème apollinien est sans cesse présent sous le principat du fondateur [[228]], sur les monnaies, sur les statues, dans la littérature. Andreas Alföldi [[229]] a même noté que le laurier propre à Apollon s'ancrait à un tel point dans l'espace civique qu'il devenait symbole de la majesté du prince. C'est dire combien les frontières entre Auguste et Apollon, entre l'humain et le divin, se troublent, deviennent floues et, pour finir, les deux identités se confondent. Les deniers qu'a frappé Auguste, après sa victoire contre Antoine en particulier, deniers qui donnent à Apollon les traits de son propre visage, en sont un excellent témoignage [[230]]. Le culte apollinien est déjà, dans la religion augustéenne, une voie privilégiée vers la divinisation, une divinisation qui n'est bien sûr que partielle et n'existe que dans l'ambiguïté des identités. Néron reprend sans hésiter cet héritage. Edward Champlin, dans sa biographie Nero [[231]], a bien insisté sur sa volonté de renouveler ce qu'il a reçu, c'est-à-dire l'augustéisme. Apollon demeure Apollon, mais son iconographie a désormais développé ce qui se trouvait chez Auguste à l'état d'esquisse. Apollon est un dieu vivant, fort et puissant. Voir en cette orientation du culte une orientalisation nous semble véridique seulement dans la mesure où cette orientalisation serait d'imprégnation augustéenne. En fait, Néron n'a rien fait d'autre que d'appliquer, jusqu'au bout, la stratégie de son aïeul, pour lequel Apollon, dieu assez nouveau dans la cité romaine, devait apporter son expressivité au service de la tradition, afin de contrecarrer autant que possible les aspirations aux cultes orientaux, en particulier isiaques, que pourraient montrer ses concitoyens. Le dieu de Délos apparaissait comme un barrage contre l'Orient. Il paraît concevable qu'il représente exactement la même chose pour Néron, qui a donné à l'apollinisme une ferveur et une vigueur sans précédent, même sous Auguste, pour satisfaire le peuple, défi qu'il a remporté. Quant à ses performances théâtrales et ce qu'elles représentent comme miracle d'incarnation, notre réponse sera double. D'une part, il ne faut pas oublier qu'Octavien avait participé au Banquet des douze dieux, sous les traits justement d'Apollon [[232]], et, d'autre part, sans nier la véracité des faits rapportés par les historiens antiques, ce qui serait une extrémité après tout pas nécessairement fausse, il est envisageable que leur méfiance et leur haine politiques envers le dernier des Julio-Claudiens leur ait inspiré un rabaissement de ce qui était une cérémonie sacrée. Néron n'est donc pas un pantin, un mégalomane, ou, si l'est, il faut déclarer qu'Auguste l'est aussi. Leur sort est lié, et c'est ce que les auteurs antiques essaient de nous cacher, mais qu'ils laissent parfois transparaître. Pour conclure sur cette interrogation religieuse, on rappellera un fait significatif : Dion Cassius [[233]] rapporte que Néron, durant son voyage en Grèce, n'avait pas voulu aller à Sparte et Athènes, et les historiens contemporains en ont déduit, de ce refus explicite de ce qu'incarnent Athènes et Sparte, qu'il refusait l'hellénisme traditionnel et lui préférait une vision hellénistique orientalisée. Ils semblent avoir négligé une donnée archéologique : sur l'architrave du Parthénon, le plus célèbre sans doute des monuments d'Athènes, fut inscrite une dédicace à Néron [[234]], dédicace témoignant de l'alliance entre le prince de Rome et l'antique Hellade, cette antique Hellade qu'Auguste avait honorée.

Si le premier et le dernier des Julio-Claudiens se rejoignent sur la religion, c'est dans la sphère politique que les points communs sont les plus flagrants, que Néron se veut le plus imitateur d'Auguste. Ils ont l'un et l'autre une relation à Rome semblable. La Ville est le principal objet de leur sentiment. Néron l'a bien montré en faisant de l'allégorie casquée de Rome avec un bouclier un de ses types les plus courants, présent à la fois sur le bronze, l'argent et l'or [[235]]. C'est manifester avec éclat l'importance considérable qu'a la Ville dans sa conception de l'Etat. Rome comme symbole politique est au centre de la conception qu'a Auguste de son rôle : les cultes qui lui sont rendus, en Orient comme en Occident, associent étroitement sa figure à celle de sa cité. Ses monnaies mêmes [[236]], qu'il s'agisse des sesterces de Lyon ou des tétradrachmes cistophores de langue latine frappés à Pergame, toutes, quand elles évoquent les hommages qui lui sont, lient son nom à celui de « Roma ». Dans la mystique du principat, il y a, pour ainsi dire, consubstantialité entre le prince et Rome. Il est à noter que Néron a toujours favorisé la Ville et ses habitants : sa politique d'assistance, héritière de celle mise en place par Auguste [[237]], est destinée uniquement aux Romains. L'évocation numismatique [[238]] du marché (ou macellum) est à rapprocher étroitement du réseau de conservation et de distribution de blé établi par Agrippa, sous les ordres de son beau-père et ami. Augusto Fraschetti, dans son étude sur Rome et le prince, prend trois thèmes principaux pour analyser la relation qu'entretient Auguste à Rome, le temps, l'espace et la religion. Le temps est, pour lui, d'abord celui des fêtes et des célébrations à la gloire du pouvoir [[239]]. Néron a respecté ce choix augustéen : plus que tout autre avant lui, il a offert au peuple des loisirs variés, donnant au temps une consonance festive durant tout son principat [[240]]. Et ses célébrations n'ont en aucun cas négligé la nécessaire religiosité : les Iuuenalia comme les Neronia s'inscrivent nettement dans l'horizon d'une solennité cultuelle du principat. Le temps, certes, mais aussi l'espace. Auguste avait formé et réformé l'espace de la Ville [[241]], en la divisant en quatorze régions, en organisant politiquement et religieusement les quartiers, en construisant des édifices à des endroits jusque là inoccupés ou si peu, comme le Champ de Mars, pourvu d'un ensemble à la fois politique et ludique. Néron, avec la reconstruction de la Ville, après l'incendie de 64, a-t-il fait autre chose que réitérer les actes de son ancêtre ? Le troisième élément de l'interprétation d'Augusto Fraschetti, c'est la religion [[242]], en particulier familiale. Celle-ci a participé, et de manière extrêmement intensive, au projet et à la politique néroniens. En 67, au retour de Grèce, à Rome, n'est-ce pas sous le nom d' « Auguste » que Néron est acclamé, selon Dion Cassius [[243]], dans les Jeux du Cirque, dont nul ne saurait nier l'ancrage religieux ? Pour résumer, si Rome, en 14, est une « ville augustéenne », selon l'expression de Werner Eck [[244]], en 68, elle est bien une ville néronienne, c'est-à-dire, en un sens, à nouveau augustéenne. Un autre élément de la vision politique d'Auguste, Ronald Syme l'a démontré, c'est d'être toujours en mouvement, c'est d'être une « révolution romaine » [[245]]. Le néronisme lui aussi est toujours en mouvement. Quelques faits du principat du fils d'Agrippine peuvent être rapprochés de leurs équivalents et probables modèles augustéens. La figure du prince a évolué, chez l'un comme chez l'autre. Néron s'est d'abord voulu héritier servile d'une tradition mal comprise : il a voulu voir dans l'augustéisme les forces d'ordre, qui l'ont incité à une placidité de mauvais aloi. Puis il a, outre cet ordre augustéen qu'il n'a pas renié, découvert l'extraordinaire subversion que représentait la vision politique d'Auguste. L'évolution qu'avait connue Octavien, passant du rang de notable italien à celui de chef de bande puis enfin de chef de l'Etat, son descendant la revit à sa manière. La conception du pouvoir a été, c'est le moins que l'on puisse dire, « bousculée » par Auguste. Il était donc légitime qu'elle le soit par Néron, son « fils adoptif », en quelque sorte. Aldo Schiavone, dans son livre L'histoire brisée, La Rome antique et l'Occident moderne, présente une thèse qui, pour être fataliste, ne propose pas moins une interprétation judicieuse de l'évolution de la vie politique romaine, du IIe siècle av. J.-C. au Ie siècle ap. J.-C.. Il souligne [[246]] que, au Ie siècle av. J.-C., l'ouverture de Rome à une économie-monde et une politique-monde l'amenait nécessairement à une décadence de l'institution sénatorial et à la mise en avant du rôle d'un seul homme, qui est César. Son propos peut être prolongé, à notre sens. Le césarisme entraînait l'augustéisme qui, lui-même, entraînait le néronisme. Chacune de ces visions politiques était grosse d'esquisses de ce qui devait devenir par la suite une autre expression de la même « révolution romaine ». Ainsi, pour assurer son pouvoir, César et plus particulièrement Auguste ont mis en place « leur » noblesse [[247]], qui leur était personnellement et fanatiquement fidèles. Néron a fait exactement de même. Lui aussi s'est inscrit dans une évolution du pouvoir, évolution qu'il a contribuée à faire avancer. Un troisième élément, et c'est peut-être le plus considérable, rapproche étroitement le premier et le dernier des Julio-Claudiens. C'est leur vision de la politique étrangère qui doit être celle de l'Empire. Les auteurs antiques ont surtout retenu de Néron son incurie, le Pseudo-Aurelius Victor l'accusant presque d'avoir été corrompu par les Parthes [[248]]. Il semble au contraire que le prince a fait preuve d'une grande maîtrise dans l'exécution de ses desseins, qui étaient ceux de la politique augustéenne. Il a voulu maintenir toutes les provinces dans l'obédience de Rome [[249]], et n'a pas hésité pour cela à envoyer des généraux capables, comme Suetonius Paulinus, qui doit au prince sa nomination à la tête des opérations en Bretagne, en 61, pour lutter contre la révolte de la reine Boudicca, ou comme Vespasien, en Judée, pour mater la révolte religieuse dans une région qui s'enflammait. Ces deux hommes qui symbolisent en quelque sorte la prudence de la politique militaire provinciale de Néron sont tous deux issus de milieux non sénatoriaux, et doivent beaucoup de leur prestige et de leur ascension sociale -fulgurante, en ce qui concerne Vespasien- à leur ancien maître. Il a voulu maintenir à tous prix la cohésion de l'Empire à l'intérieur. A l'extérieur, il a tenté de préserver la Pax Romana, si chère au cœur d'Auguste [[250]]. Comme prince, il en est le garant, comme héritier d'Auguste, il en est le protecteur. Un témoignage numismatique [[251]] est particulièrement instructif au sujet de cette paternité augustéenne du maintien néronien de Pax Romana. Un sesterce représentant le temple de Janus, les portes fermées, est associé à une légende qui n'est rien d'autre qu'une citation à peine modifiée des Res gestae diui Augusti, du Tableau des Hauts Faits. La politique parthique de Néron est de nouveau inspirée par l'exemple augustéen [[252]]. Oscillant entre négociation et guerre, elle a pour leitmotiv la fermeté envers l'ennemi héréditaire des Romains. Inspiré dans sa relation au royaume perse par le modèle d'Alexandre, comme Auguste[[253]], il n'en défend pas moins les intérêts de Rome. Les victoires de Corbulon, la venue de Tiridate à Rome en 66, tous ces événements témoignent du succès de sa politique, et de la suprématie obtenue par la Ville en Orient. Plutôt que critiquer en lui l'absence de talents militaires, il est sans doute plus juste de rappeler qu'Auguste lui-même en était totalement dépourvu. Mais dans les affaires diplomatiques, Néron s'est très vite montré être un maître. S'il avait simplement imposé son candidat sur le trône d'Arménie, c'eût été un succès romain de plus. Mais le couronnement de Tiridate, venu à Rome en suppliant, est un événement qu'aujourd'hui encore il suscite des débats. On pourrait presque dire qu'il est, à lui seul, l'aboutissement de la politique parthique d'Auguste. « Néron, politique réaliste » [[254]] : cette expression peut sembler étrange. Pourtant, il semble bien qu'elle soit véridique. Si le dernier des Julio-Claudiens a tant en commun avec son ancêtre, il existe une différence fondamentale : en 14, Auguste meurt paisiblement. En 68, les généraux soucieux de la défense de leurs intérêts, désireux de faire cesser le phénomène néronien et, surtout, d'imposer leur pouvoir de seigneurs de guerre, se rebellent. Néron est acculé au suicide, qu'il commet. Mais même ce suicide est augustéen. Le « Qualis artifex pereo » [[255]], sa dernière parole, souvent traduit par « quel artiste périt avec moi », est en fait à entendre en un sens théâtral. « Artifex » veut aussi dire l' « acteur ». Néron reprend l'appel au bis qu'avait lancé Auguste[[256]].

Qui Néron était-il ? Une conclusion impossible

Néron est incontestablement une figure contestée de l'Histoire. Son rôle dans son époque a été sujet à des interprétations diverses et divergentes, allant même jusqu'à la contradiction totale. S'il n'est certainement par un saint, ce prince de Rome n'en porte pas moins, et à jamais, les stigmates du pouvoir. Certains ont vu dans la construction politique, religieuse et culturelle des dernières années le fruit d'une longue réflexion, d'une lente maturation. D'autres ont préféré y voir les conséquences d'une libération due à l'éloignement ou à la mort des principaux mentors du prince. Néron était-il « antonien », comme l'a voulu Eugen Cizek ? Néron était-il orientalisé, comme l'a soutenu Gilbert Charles-Picard ? Néron était-il le défenseur d'un nouveau modèle politique, comme l'a proposé Paul Veyne ? Néron était-il augustéen, comme Edward Champlin l'a remarqué ? Chacune de ces hypothèses ouvre à des débats, à des conflits d'idée, chacun trouvant, dans les fouilles, dans les œuvres d'art, dans les monnaies, dans les textes littéraires, de l'eau à apporter à son moulin. La complexité des sources ne facilite pas la tâche de celui qui s'intéresse de près au « procès Néron ». Les historiens antiques, les écrivains des temps romains, n'ont jamais éprouvé de sympathie pour l' « Antéchrist », pour le « monstre ». Bien plus, ils ont noirci son image, en brossant de lui un portrait rhétorique, auquel tous les accessoires du monstrueux sont ajoutés. Complice de parricide, matricide, incestueux, débauché, violent, mégalomane, rien ne lui a été épargné. Des faits rapportés par des auteurs considérés souvent comme sûrs, Suétone, Tacite, sont strictement impossibles. Et pourtant, il est nécessaire d'avoir recours aux historiens romains pour construire une étude traitant de l'homme et de son temps, tout en se méfiant terriblement de ces « traîtres traducteurs ».

Que faut-il donc faire pour écrire sur Néron ? Rejeter tous les auteurs antiques comme de mauvaise foi, et ne s'intéresser qu'aux fouilles de la Domus Aurea, de la Villa de Subiaco, des demeures d'Oplontis, aux multiples statues du prince, à ses non moins multiples monnaies ? Cette option est intenable, on le voit bien. Sinon, doit-on considérer qu'il faut refuser la véracité de tout ce qui peut sembler le fruit d'une interprétation psychologique ou analytique des écrivains latins, et accepter les « faits, les âpres faits » ? C'est la position de Michel Rambaud sur César. Etudiant L'Art de la Déformation historique dans les Commentaires de César, il considère que c'est dans les liaisons logiques, dans le la subtilité rhétorique que le général « déforme » la vérité, par touches [[257]], sans trop changer aux faits. Après tout, pourquoi ne pas faire ainsi ? Considérer les « faits bruts » et nier aux interprétations, aux tableaux, aux détails littéraires tout droit à une existence historique contemporaine. Mais ainsi, ne se prive-t-on pas d'informations essentielles dans la compréhension des temps néroniens, bien plus, dans la compréhension de la psychologie de Néron et de son rôle dans son époque ? C'est là un grand danger.

Toutefois, si l'on s'en tient aux auteurs antiques, le portrait que l'on peut tracer du dernier des Julio-Claudiens est particulièrement inintéressant. Régis Martin s'y est essayé. Voyons le résultat : Néron est obsédé par l'argent, a peur de la mort, fait des abus de pouvoir, est psychiquement malade, indécis, débauché, superficiel, déréglé quant à sa vision religieuse son autorité, atteint de tares héréditaires, sexuellement excessif, homosexuel, d'une santé faible, souffre d'un goitre exophtalmique, de maladies ORL, ne pense qu'à jouer, est phobique, vaniteux, laid, démagogue, tyrannique avec le Sénat, pense à la postérité, est mégalomane et insupportable dans la vie quotidienne [[258]]. Ce portrait est lui-même superficiel et extravagant. Il est impossible de résumer la complexité d'une figure historique et de ses actions historiques à un psychologisme aussi primaire, psychologisme dont la voie nous est grande ouverte par les auteurs antiques. Cette liste nous montre à la perfection, s'il en était besoin, la difficulté de l'établissement d'une définition précise, juste et rigoureuse d'une personnalité romaine, de surcroît aussi diffamée qu'a pu l'être Néron. Il ne faut pas chercher à cacher la terrible répression qu'il fit subir aux classes dirigeantes. Il faut plutôt chercher à l'expliquer. Et c'est faisable. Néron, arrière-arrière-petit-fils du fondateur du principat, cherchait à imiter son aïeul. Et l'imitatio Augusti consiste aussi à préserver indivis son pouvoir contre toutes les attaques qui pourraient être lancées contre lui. Le prince de Rome avait cette mission, qu'il a accomplie. Par la suite, les écrivains, propagandistes de génie, ont repris son histoire sous les Flaviens et les Antonins, ses successeurs. Il n'est pas utile qu'un ancien chef de l'Etat soit aussi populaire, cela nuit à la popularité propre des princes régnants. Néron était entré dans une nuit de deux mille ans.
 
 

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Notes :

[[1]]P. Grimal, Le procès Néron, p. 13 notamment

[[2]]Voir sur ce point la préface étonnante de Gérard Walter à sa biographie, Néron, pp. 9-10

[[3]]M. Sartre, Histoires grecques, pp. 373-382

[[4]]R. Martin, Les récits tacitéens des crimes de Néron sont-ils fiables ?, in J.-M. Croisille, Y. Perrin et R. Martin (dir.), Neronia V,  pp. 75-85 ; sur l'écriture tacitéenne et son imprégnation par les idées de l'auteur, R. Syme, Tacitus, pp. 521-533

[[5]]Souvent appelé à tort Discours des Césars : 310d

[[6]]Histoire ecclésiastique, II, XXV, 1

[[7]]L'expression est de Jean-Michel Roddaz, dans le Dictionnaire de l'Antiquité dirigé par Jean Leclant, p. 1520

[[8]]Calpurnius Siculus, Bucoliques, I, 42 ; cpr. Virgile, Bucoliques, IV, 9

[[9]] Sénèque, De la Clémence, I, 6 ; cpr. Auguste, Res gestae, 34

[[10]] Octavie, en particulier v. 249-251

[[11]] Par exemple, Annales, XIV, 60, 1

[[12]] Suétone, Vie de Néron, XXVI, 1

[[13]]Pseudo-Lucien, Néron, 10

[[14]]Eutrope le dit explicitement dans son Abrégé d'Histoire romaine, VII, 14

[[15]]J. Ginsburg, Representing Agrippina, Constructions of Female Power in the Early Roman Empire, pp. 106-132 et la preface d'Erich S. Gruen, pp. 3-8

[[16]]Sur ces questions généalogiques, J.-P. Néraudau, Auguste, p. 392 et p. 394

[[17]] Gerhard Waldherr a bien étudié la gloire des Domitii : G. Waldherr, Nero, pp. 13-15

[[18]]Suétone, Vie de Néron, I-V

[[19]]R. Martin, Les douze Césars, pp. 74-76

[[20]]J. Gascou, Suétone historien, en particulier pp. 675-706

[[21]] J. Ginsburg, Representing Agrippina, pp. 106-132

[[22]]Suétone, Vie de Néron, VI, 5

[[23]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, p. 30 ; sur Anicetus, Suétone, Vie de Néron, XXXV, 2 et Tacite, Annales, XIV, 3, 3

[[24]]Pline l'Ancien, Histoire naturelle, XXX, 14 ; Tacite, Annales, XIII, 3 ; Suétone, Vie de Néron, X

[[25]]Jürgen Malitz a bien évoqué les circonstances du retour en grâce de Sénèque : Nero, pp. 8-9

[[26]]G. Walter, Néron, p. 44

[[27]]Tacite, Annales, XII, 8-9

[[28]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, XXXIII, 3 ; Suétone, Vie de Claude, XXIX, 1 ; Tacite, Annales, XII, 25-26

[[29]]G. Ferrero, Characters and Events of Roman History, From Caesar to Nero,p. 104

[[30]]Christophe Badel, La noblesse de l'Empire romain, Les masques et la vertu, pp. 246-247

[[31]]Tacite, Annales, XII, 41

[[32]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 90-94, p. 177; H.-M. von Kaenel, Münzprägung und Münzbildnis des Claudius, pp. 240-241

[[33]]P. Zanker, Augustus und die Macht der Bilder, pp. 217-226 et T. Fischer, Ideologie in Schrift und Bild, Augustus als der ‚Vater' seiner Söhne und des Vaterlands, pp. 12-22

[[34]]Suétone, Vie de Néron, VII, 1

[[35]]Suétone, Vie de Néron, VII, 7

[[36]]G. Achard, Néron, p. 20

[[37]]Tacite, Annales, XII, 66-67 ; Suétone, Vie de Claude, XLIV ; Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 34, 2-35, 4

[[38]]Flavius Josèphe, Les Antiquités juives, XIX, 5 ; G. Achard, Néron, p. 21 ; pour un commentaire équilibré des deux thèses, B. H. Warmington, Nero, Reality and Legend, pp. 19-20

[[39]]Suétone, Vie de Néron, IX, 2

[[40]]Aurelius Victor, Livre des Césars, 5, 2

[[41]]Pseudo-Aurelius Victor, Abrégé des Césars, V, 2

[[42]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, p. 115 sq.

[[43]]T. E. J. Wiedemann, Tiberius to Nero, in A. Bowman, E; Champlin et A; Lintott (dir.), The Cambridge Ancient History, X The Augustan Empire, 43 B. C.-A. D. 69, pp. 250-251

[[44]]M. A. Levi, Corso dei prezzi et riforma monetaria neroniana, in Les dévaluations à Rome, pp. 173-183

[[45]]Sur le rôle joué par le Conseil du Prince, G. Achard, Néron, p. 27-28

[[46]]Tacite, Annales, XIII, 2, 1 et 6, 3 ; Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 4, 5

[[47]] Sur le lien antagonistique entre Claude et Auguste, Sénèque, Apocoloquintose, IX, 5-XI, 6

[[48]]E. Cizek, Néron, pp. 84-89

[[49]]Apocoloquintose, IV, 1, 25, 31

[[50]]E. Cizek, Néron, p. 89

[[51]]J.-N. Néraudau, Auguste, La brique et le marbre, pp. 123-137

[[52]]Comme l'a bien montré L. A. Garcia Moreno, Alejandro Magno y la politica exterior de Augusto, J.-M. Croisille, Neronia IV, pp.132-141

[[53]]J. Clarke, Augustan domestic interiors, Propaganda or fashion, in K. Galinsky (dir.), The Cambridge Companion to the Age of Augustus, pp. 271-272; P. Cosme, Auguste, pp. 118-119

[[54]]P. Grimal, Sénèque, ou la conscience de l'empire, pp. 68-78

[[55]]F.-R. Chaumartin, édition de De la Clémence, p. XXXVIII

[[56]]F.-R. Chaumartin, édition de De la Clémence, pp. XXXIV-XXXV ; Sénèque, De la Clémence, I, 18, 1

[[57]]Sénèque, De la Clémence, IX, 1-XI, 1

[[58]] A. De Vivo et E. Lo Cascio (dir.), Seneca uomo politico e l'età di Claudio e di Nerone : F. D'Ippolito, Etica e stato in età giulio-claudia, pp. 11-35, G. Mazzoli, Seneca De Ira e De Clementia : la politica negli specchi della morale, pp. 123-138

[[59]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 10, 2-3

[[60]]E. Cizek, Néron, pp. 93-96

[[61]]Tacite, Annales, XIII, 22

[[62]]Sur ces points, G. Achard, Néron, pp. 28-29

[[63]]Sur ce point, B. H. Warmington, Nero : Reality and Legend, pp. 34-42

[[64]]Par exemple, H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 416-423, p. 72

[[65]]R. Wolters, Prägungen des Kaisers vs. Prägungen des Senat, Mommsens « Dyarchie-These » und die antike Numismatik, in H.-M. von Kaenel, M. Rosenbaum-Alföldi, U. Peter, H. Komnick (dir.), Geldgeschichte vs. Numismatik, Theodor Mommsen und die antike Numismatik, p. 261

[[66]]R. Carson, Coins of the Roman Empire, p. 17

[[67]]J. Carcopino, Virgile et les origines d'Ostie, pp. 635-648

[[68]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 35, 1

[[69]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 3, 2-3

[[70]]E. Cizek, Néron, pp. 96-100

[[71]]Pour une approche « classique » de l'ambition d'Agrippine, J.-M. Croisille, Néron a tué Agrippine, pp. 53-55

[[72]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 1-2, p. 200

[[73]]C'est notamment l'analyse de Humphrey Sutherland: C. H. V. Sutherland, Coinage in Roman Imperial Policy, pp. 153-155

[[74]]Suétone, Vie de Néron, XXVIII, 6

[[75]]Y. Roman, Empereurs et sénateurs, Une histoire politique de l'Empire romain, pp. 244-245

[[76]]J. Ginsburg, Representing Agrippina, pp. 107-112

[[77]]J. Ginsburg, Representing Agrippina, pp. 112-116

[[78]]J. Ginsburg, Representing Agrippina, pp. 116-119

[[79]]J. Ginsburg, Representing Agrippina, p. 70

[[80]]Tacite, Annales, XIV, 16

[[81]]Voir sur ce point les travaux de Florence Dupont, en particulier Les monstres de Sénèque, pp. 91-122; l'universitaire parisienne a aussi rédigé des traductions des pièces de l'auteur latin pour une mise en scène théâtrale, en particulier l'Œdipe à la Cartoucherie et le Thyeste à la Comédie française.

[[82]]P. Grimal, Sénèque, p. 459

[[83]]La plus intéressante est la suivante : Anthologie palatine, 178

[[84]]Sur cette question de datation, voir l'introduction déjà ancienne mais néanmoins toujours pertinente d'Abel Bourgery à l'édition de la Collection des Universités de France, La guerre civile (La Pharsale), t. I, pp. VIII-XI

[[85]]L' « inquiétante étrangeté » est particulièrement perceptible, entre autres passages célèbres, dans la prosopopée de la Patrie, I, v. 183-212, et dans les portraits affrontés de César et Pompée, I, v. 122-140 notamment.

[[86]]J.-M. Croisille, Poésie et art figuré de Néron aux Flaviens, Recherches sur l'iconographie et la correspondance des arts à l'époque impériale, pp. 14-15 ; sur le souci manifesté par Néron de favoriser les écrivains, H. Bardon, Les empereurs et les lettres latines, pp. 221-256

[[87]]J.-M. Croisille, Poésie et art figuré de Néron aux Flaviens, Recherches sur l'iconographie et la correspondance des arts à l'époque impériale, p. 878-904

[[88]]Lucain, Pharsale, I, 33-66

[[89]]Ne serait-ce que le Laocoon du livre III de l'Enéide, v. 199-227

[[90]]D. Feeney, Literature and religion at Rome, Cultures, contexts, and beliefs, pp. 12-46

[[91]]Tacite, Annales, XIV, 48-49; M. Griffin, Néron, ou la fin d'une dynastie, pp. 73-92

[[92]]M. K. Thornton, The Augustan tradition and Neronian economics, in H. Temporini (dir.), Aufstieg und Niedergang der römischen Welt, Principat, II, 2, pp. 149-175

[[93]]Sur la défense du limes rhénan, E. Cizek, Néron, pp.321-322

[[94]]C'est une des seules informations véraces dont les auteurs tardifs nous laissent trace : Aurelius Victor, Livre des Césars, 5, 2 ; Pseudo-Aurelius Victor, Abrégé des Césars, V, 4

[[95]]E. Cizek, Néron, p. 325

[[96]]E. Sydenham, The Coinage of Nero, pp. 64-66

[[97]]Suétone, Vie de Néron, XXVIII, 2; Tacite, Annales, XIII, 12

[[98]]Voir sur ce point la tragédie du Pseudo-Sénèque, Octavie, v. 93-98

[[99]]Tacite, Annales, XIII, 45-46

[[100]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 7, 4 ; le tableau tacitéen est demeuré fameux : Annales, XIII, 15-17 ; Suétone, Vie de Néron, XXXIII, 5-7

[[101]] Georges-Roux, Néron, pp. 340 sq. ; R. Martin, Les récits tacitéens des crimes de Néron sont-ils fiables ?, in J.-M. Croisille, Y. Perrin et R. Martin (dir.), Neronia V, pp. 75-85

[[102]]E. Champlin, Nero, p. 85

[[103]]J.-M. Croisille, Néron a tué Agrippine, pp. 64-66

[[104]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, p. 81

[[105]]J. Malitz, Nero, p. 26

[[106]]B. H. Warmington, Nero : Reality and Legend, p. 45

[[107]]M. Grant, Nero, pp. 46-47

[[108]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 14, 1; Tacite, Annales, XIV, 1-9 ; Suétone, Vie de Néron, XXXIV, 3-7

[[109]]Pour ne citer que trois auteurs, G. Achard, Néron, pp. 43-50 ; E. Cizek, Néron, pp. 59-63 ; G. Waldherr, Nero, pp. 86-90

[[110]]P. Veyne, L'Empire gréco-romain, p. 127 et pp. 156-157

[[111]]l'expression est de Tacite : Histoires, I, 4, 3

[[112]]M. K. Thornton, The Augustan tradition and Neronian economics, in H. Temporini (dir.), Aufstieg und Niedergang der römischen Welt, Principat, II, 2, les pages 163-168

[[113]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 136-141, pp. 224-226

[[114]]Suétone, Vie de Néron, XI, 1

[[115]]J-P. Thuillier, Le sport dans la Rome antique, pp. 177-179

[[116]]Tacite, Annales, XIV, 47 ; Dion Cassius, Histoire romaine, LXI, 21 ; Martial, Epigrammes, VII, XXXIV, 4

[[117]]J. Malitz, Nero, pp. 66-73

[[118]]Tacite, Annales, XV, 44

[[119]]J.-C. Pichon, Saint Néron, pp. 60-84

[[120]]C. Saumagne, Les incendiaires de Rome (en 64 ap. J.-C.) et les lois pénales des Romains, in Revue historique, 1962, pp. 337-360

[[121]]Tacite, Annales, XIV, 51 ; Miriam Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, pp. 119-120

[[122]]F. des Boscs-Plateaux, Un parti hispanique à Rome ? Ascension des élites hispaniques et pouvoir politique d'Auguste à Hadrien (27 av. J.-C. - 138 ap. J.-C.), p. 292

[[123]]Suétone, Vie de Néron, LVII, 2

[[124]]CIL IV, 4814

[[125]]J. L. Mourgues, Néron et les monarchies hellénistiques : le cas des Augustians, in J.-M. Croisille (dir.), Neronia IV,  pp. 196-210

[[126]]Tacite lui-même le reconnaît : Annales, XV, 73-74

[[127]]E. Cizek, Néron, p. 356

[[128]]Par exemple, L. Homo, Nouvelle histoire romaine, III, 2, p. 251

[[129]]Zvi Yavetz a bien montré combien le schème wébérien s'applique bien à César : Z. Yavetz, César et son image, Des limites du charisme en politique, pp. 210-211 ; M. Weber, Wirtschaft und Gesellschaft, pp. 124 et 140

[[130]]Pline l'Ancien, Histoire naturelle, XVIII, 35

[[131]]M. Rostovtseff, Histoire économique et sociale de l'Empire romain, pp. 86-87

[[132]]Tacite, Annales, XIV, 22

[[133]]Tacite, Annales, XIV, 48

[[134]]P. Grimal, Sénèque, pp. 208-212

[[135]]C'est la trame de la pièce du Pseudo-Sénèque, Octavie.

[[136]]Voir sur ce point l'étude qu'en fait Miriam Griffin : Néron ou la fin d'une dynastie, pp. 116-117 ; et sur la présence importante du judaïsme en Campanie, C. Giordano et I. Kahn, The Jews in Pompeii, Herculaneum, Stabiae and in the Cities of Campania Felix, pp. 19-55

[[137]]B. H. Warmington, Nero : Reality and Legend, pp. 149-151

[[138]]E. Cizek, Néron, pp. 223-246

[[139]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 29, 3-4

[[140]]Epicure, Lettre à Ménécée, 122

[[141]]J.-P. Martin, PROVIDENTIA DEORUM, Aspects religieux du pouvoir romain, p. 45

[[142]]I. Cogitore, La légitimité dynastique d'Auguste à Néron à l'épreuve des conspirations, pp. 78-85

[[143]]I. Cogitore, La légitimité dynastique d'Auguste à Néron à l'épreuve des conspirations, pp.249-263

[[144]]Tacite, Annales, XV, 60, 2-63, 3

[[145]]P. Grimal, Sénèque, pp. 238-239

[[146]]Tacite, Annales, XVI, 21-35

[[147]]H. Zehnacker, Tensions et contradictions dans l'Empire au Ier siècle, Les témoignages numismatiques, in A. Giovannini et D. van Berchem (dir.), Oppositions et résistances à l'Empire d'Auguste à Trajan, Entretiens sur l'Antiquité classique, tome XXXIII, pp. 333-334

[[148]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 67-76, pp. 209-210

[[149]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 87-100, pp. 212-213

[[150]]P. Cosme, Auguste, p. 208; J.-P. Martin, PROVIDENTIA DEORUM, Aspects religieux du pouvoir romain, pp. 78-79; un denier a même été frappe par Auguste au type de Salus : Harold Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 91-94, p. 17

[[151]]F. Dupont, L'altérité incluse, in Florence Dupont et Emmanuelle Valette-Cagnac (dir.), Façons de parler grec à Rome, pp. 255-267

[[152]]F. di Matteo, Villa di Nerone a Subiaco, pp. 141-167

[[153]]G. Achard, Néron, pp. 92-96

[[154]]Suétone, Vie de Néron, XXXI, 2-3

[[155]]G. Charles-Picard, Auguste et Néron, Le secret de l'Empire, pp. 163-164

[[156]]C'est l'interprétation d'Eugen Cizek : Néron, pp. 164-165 ; et de Gilbert Charles-Picard, Auguste et Néron, Le secret de l'Empire, pp. 203-210

[[157]]Tacite, Annales, XVI, 6

[[158]]Gilbert Charles-Picard, Auguste et Néron, Le secret de l'Empire, pp. 217-218

[[159]]R. Bianchi Bandinelli, Rome, Le centre du pouvoir, pp. 130- 143 et p. 212

[[160]]C'est par choix délibéré que nous n'intégrons pas cet auteur à notre étude, puisque la date de l'écriture et du déroulement de son roman demeure sujette à caution.

[[161]]Pline l'Ancien, Histoire naturelle, XXX, 17

[[162]]Pour une approche critique, voire notamment M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, pp. 262-263

[[163]]G. Charles-Picard, Auguste et Néron, Le secret de l'Empire, pp. 166-167

[[164]]E. Cizek, Néron, pp. 146

[[165]]H.-P. L'Orange, Domus Aurea, Der Sonnenpalast, in, Serta Eiteremiana 11, pp. 68-100

[[166]]E. Cizek, Néron, p. 130

[[167]]Suétone, Vie de Néron, XXXI, 3

[[168]]G. Charles-Picard, Auguste et Néron, Le secret de l'Empire, p. 202 ; R. Turcan, Les cultes orientaux dans le monde romain, pp. 21, 53 et 92

[[169]]Tacite, Annales, XV, 52, 2 ; E. Cizek, Néron, p. 131

[[170]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 57-60, p. 208

[[171]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 234-238, pp. 245-246, 254-258, pp. 249-250, 376-377, p. 274

[[172]]C. H. V. Sutherland, Coinage in Roman Imperial Policy, p. 170

[[173]]E. Cizek, Néron, p. 131

[[174]]R. Martin, Les douze Césars, pp. 310-312

[[175]]E. Cizek, Néron, pp. 407-409

[[176]]E. Cizek, Néron, p. 85

[[177]]Jean Chrysostome, IVe Homélie sur IIe Timothée, 3

[[178]]M. Bergmann, Zur Inschrift von Akraiphia, in J.-M. Croisille et Y. Perrin (dir.), Neronia VI, pp. 273-284

[[179]]E. Cizek, Néron, p. 85

[[180]]G. Waldherr, Nero, pp. 206-208

[[181]]M. Grant, Nero, pp. 187-195

[[182]]S. Benoist, Les Romains croyaient-ils en la divinité de leurs principes ?, in A. Vigourt, X. Loriot, A. Bérenger-Badel et B. Klein (dir.), Pouvoir et religion dans le monde romain, En hommage à Jean-Pierre Martin, pp. 115-127

[[183]]Pline l'Ancien, Histoire naturelle, IX, 58

[[184]]Tacite, Annales, XVI, 1-3

[[185]]J.-P. Martin, PROVIDENTIA DEORUM, Aspects religieux du pouvoir romain, pp. 146-162

[[186]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, p. 213

[[187]]E. Cizek, Néron, p. 122

[[188]]P. Le Roux, Le Haut-Empire romain en Occident, D'Auguste aux Sévères, p. 99

[[189]]B. H. Warmington, Nero : Reality and Legend, pp. 108-122

[[190]]Plutarque, Moralia, 505c et 567f

[[191]]E. Cizek, Néron, pp. 161-164

[[192]]J.-P. Thuillier, Le sport dans la Rome antique, pp. 177-179

[[193]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 14, 1

[[194]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 20, 1-6

[[195]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 21, 1

[[196]]H. Bardon, Les empereurs romains et les Lettres latines, D'Auguste à Hadrien, pp. 191-220

[[197]]E. Champlin, Nero, pp. 112-144

[[198]]Y. Perrin, Présence de Dionysos dans la fabrique de la Domus aurea de l'Esquilin, in Annie Vigourt, Xavier Loriot, Agnès Bérenger-Badel et Bernard Klein (dir.), Pouvoir et religion dans le monde romain, En hommage à Jean-Pierre Martin, pp. 129-146 ; sur ce point, voir aussi E. Moormann, P. G. P. Meyboom, L'interpretazione delle scene figurative nelle decorazioni dipinte della Domus Aurea, in J.-M. Croisille et Y. Perrin (dir.), Neronia VI,  p. 49

[[199]]M. A. Levi, Corso dei prezzi et riforma monetaria neroniana, in Les dévaluations à Rome, pp. 179

[[200]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, p. 253

[[201]]M. Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, pp. 258-260

[[202]]Anthologie palatine, IX, 17-18, 387

[[203]]M. Smallwood, Documents illustrating the principates of Gaius, Claudius and Nero, n°25-26

[[204]]S. Benoist, Rome, le prince et la Cité, p. 53

[[205]]M. Tarpin, Roma Fortunata, Identité et mutations d'une ville éternelle, pp. 234-236

[[206]]P. Zanker, Augustus und die Macht der Bilder, pp. 73-79

[[207]]P. Veyne, L'élégie érotique romaine, L'amour, la poésie et l'Occident, pp. 195-217

[[208]]J.-M. Croisille, La peinture romaine, pp. 68-71 et 81-91

[[209]]A. Fraschetti, Rome et le prince, pp. 213-285

[[210]]F. Millar, The Emperor in the Roman World, pp. 430-431

[[211]]R. Beacham, The emperor as impresario : producing the pageantry of power, in Karl Galinsky (dir.), The Cambridge Companion to the Age of Augustus, pp. 151-174

[[212]]Nicolas de Damas, Vie de l'empereur Auguste, III, 5 ; un autre signe de penchant pour l'héritage macédonien nous est donné par Suétone, Vie d'Auguste, L

[[213]]David MacDowall, The Western Coinages of Nero, pp. 29-30

[[214]]Pline l'Ancien, Histoire naturelle, XXXIII, 3

[[215]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 183-190, pp. 234-235

[[216]]J. Scheid, La religion publique à Rome sous le principat de Néron, in J.-M. Croisille et Y. Perrin, Neronia VI p. 523

[[217]]J. Gagé, Divus Augustus, in Revue Archéologique, XXXIV, juillet-octobre 1931, p. 35

[[218]]J. Gagé, Divus Augustus, in Revue Archéologique, XXXIV, juillet-octobre 1931, pp. 30-34

[[219]]I. Gradel, Emperor worship and Roman religion, pp. 135-137, 188 et 220

[[220]]Harold Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 52-55, p. 208

[[221]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 360-365, pp. 271-272

[[222]]M. Grant, Roman Anniversary Issues, pp. 79-87

[[223]]R. Etienne, Le culte impérial dans la péninsule ibérique d'Auguste à Dioclétien, p. 433

[[224]]M.Griffin, Néron ou la fin d'une dynastie, pp. 260-266

[[225]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 38-42, pp. 7-8

[[226]]D. Boschung, Die Bildnisse des Augustus, cpr. 3, 6, 35, 45, 152, pp. 108, 110, 125, 129-130, 171 et passim

[[227]]A. Alföldi, Die zwei Lorbeerbäume des Augustus, pp. 50-54

[[228]]A. Alföldi, Die zwei Lorbeerbäume des Augustus, pp. 15-17

[[229]]R. Albert, Das Bild des Augustus auf den frühen Reichsprägungen, Studien zur Vergöttlichung des ersten Prinzeps, pp. 32-38

[[230]]E. Champlin, Nero, pp. 138-144

[[231]]Suétone, Vie d'Auguste, LXX, 1

[[232]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 14, 3

[[233]]M. Beard, J. North et S. Price, Religions de Rome, p. 325

[[234]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 81-86, p. 211, 114-121, pp. 216-217, 168-182, pp. 231-234

[[235]]B. Simon, Die Selbstdarstellung des Augustus in der Münzprägung und in den Res Gestae, pp. 149-150

[[236]]N. de Chaisemartin, Rome, Paysage urbain et idéologie, Des Scipions à Hadrien (IIe s. av. J.-C.-IIe s. ap. J.-C.), pp. 104-105; P. Corbier, Rome, Ville et capitale, De la fin de la République à la fin des Antonins, pp. 76-78

[[237]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 191-197, pp. 236-237

[[238]]A. Fraschetti, Rome et le prince, pp. 11-50

[[239]]G. Waldherr, Nero, pp. 201-206

[[240]]A. Fraschetti, Rome et le prince, pp. 131-285

[[241]]A. Fraschetti, Rome et le prince, pp. 287-374

[[242]]Dion Cassius, Histoire romaine, LXII, 20, 5

[[243]]W. Eck, Augustus und seine Zeit, pp. 99-106

[[244]]R. Syme, The Roman Revolution, pp. 313-330 pour la mise en place de ce nouvel ordre romain.

[[245]]A. Schiavone, L'histoire brisée, La Rome antique et l'Occident moderne, pp. 206-208

[[246]]J. Osgood, Caesar's legacy, Civil War and the Emergence of the Roman Empire, pp. 251-297

[[247]]Ps. Aurelius-Victor, Abrégé des Césars, V, 8

[[248]]B. H. Warmington, Nero : Reality and Legend, pp. 72-79 et 100-107

[[249]]R Syme, The Roman Revolution, pp. 509-524

[[250]]H. Mattingly, A catalogue of the Roman coins in the British Museum, Volume I, Augustus to Vitellius, 156-167, pp. 229-231; Res gestae, 13; C. Perassi, dans Edifici et monumenti sulla monetazione di Nero, in J.-M. Croisille et Y. Perrin (dir.), Neronia VI,  p. 28

[[251]]Res gestae, 29 et 32

[[252]]L. A. Garcia Moreno, Alejandro Magno y la politica exterior de Augusto, in J.-M. Croisille (dir.), Neronia IV, pp.132-141

[[253]]J. Wolski, Néron, politique réaliste, in J.-M. Croisille, R. Martin et Y. Perrin (dir.), Neronia V, pp. 11-20

[[254]]Suétone, Vie de Néron, XLIX, 1

[[255]]Suétone, Vie d'Auguste, XCIX, 1

[[256]]M. Rambaud, L'Art de la Déformation historique dans les Commentaires de César, pp. 370-373

[[257]]R. Martin, Les douze Césars, p. 435

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Updated: 1 February 2007

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